Business as usual …Tandis que l’attention du monde se focalise sur les deux ouragans, Harvey et Irma (pas la douce…), pendant que l’Europe est médusée par les efforts du Jupiter français qui lui promet que la France, tout en étant irréformable va se reformer, pendant que le PSG paye quelques 400 millions d’euros (soit l’équivalent de 26.500 années de SMIG) pour acheter deux joueurs de football, en Syrie on continue à s’entretuer sous l’œil nonchalant des deux super puissances mondiales. Une qui déclare, en veux-tu, en voilà, être l’allié indéfectible d’Israël, l’autre qualifié de « frennemi » (friend-enemy) – ami pour tout ce qu’il peut obtenir d’Israël, ennemi pour tout ce qu’il ne veut pas apporter à ce pays (son influence dans - le monde arabe, par exemple).
Bon, des musulmans tuent des musulmans… pourquoi s’en faire ? S’il n’y avait que cela on pourrait s’occuper des autres malheurs du monde, du sort des Rohingyas en Birmanie, du décès de Pierre Berger ou du spectacle qui se prépare, les manifs contre les réformes de Jupiter… Mais il y a autre chose.
La Corée du Nord et, à 5.000 km d’elle, Israël. Quèsaco ?
Plus de 25 ans se sont écoulés depuis que la dictature héréditaire installée par la Russie Soviétique et la Chine Communiste dans ce pays, avec un zèle à nul autre pareil, œuvre pour devenir puissance nucléaire et pour disposer de moyens de transport nécessaires pour menacer le monde entier ou, à tout le moins, ceux qui seraient ses adversaires.
L’Occident, avec les Etats Unis à leur tête, ont été incapables d’arrêter la marche de ce pays vers les armes nucléaires. Pire, en se laissant manœuvrer par ce pays - qui a disposé de la complicité évidente de la Russie et de la Chine - lui a fourni des moyens de survie quand son peuple faisait face à des famines répétées, en se laissant tromper par des promesses concernant l’arrêt de son entreprise. Tant et si bien qu’aujourd’hui ce pays est devenu puissance nucléaire et va disposer (ou dispose déjà) de moyens de transports des armes idoines. Pendant les 25 dernières années la justification, unique, avancée pour la poursuite du Graal nucléaire a été la soi-disant « agression américaine » Parallèlement, l’obtention d’une assurance « en béton » pour la pérennité de la dictature. Deux autres pays ont essayé de faire de même, l’Irak de Saddam Hussein et la Libye du Colonel Kadhafi. Leur sort est connu, il sert d’exemple, d’un côté, au monde mais d’un autre côté, à la Corée du Nord. On va s’expliquer.
En 1981, à l’encontre de la volonté des Etats Unis et sans rien dire à quiconque, Menahem Bégin, Premier Ministre d’Israël, a ordonné (contre la volonté de l’Etat Major du Tsahal et, même, celle du légendaire Moshe Dayan) le bombardement de la centrale nucléaire « Osirak » de Saddam Hussein (que la France irresponsable de J. Chirac et de V. Giscard d’Estaing lui avait fourni). Begin venait d’expliciter ce qui est devenu la doctrine d’Israël depuis : « Israël ne permettra à ses ennemis jurés d’obtenir les moyens nécessaires pour sa destruction » Gardons cela présent à l’esprit, on pourra comprendre plus facilement ce qui s’est passé depuis.
On se souvient de la première guerre du Golfe : l’Irak a tiré quelques quarante fusées contre Israël qui, pourtant, ne participait pas à la coalition formée pour sortir l’Irak du Koweït. Et la coalition a gagné sa guerre car Saddam n’avait pas d’armes nucléaires. A-t-on un doute sur le fait qu’il s’en serait servi autrement ? Ou que l’on aurait transigé, d’une manière ou d’une autre, si cela eut été le cas ? C’est la leçon tirée par la Corée du Nord, c’est ce que la Libye a tenté de faire.
Mais un autre pays a tiré la même leçon : l’Iran. Dans les convulsions qui ont suivi le « printemps arabe » ce pays - qui a mis à son frontispice de « république islamique » l’ardente obligation de faire disparaître de la carte Israël, ce pays a suivi, pendant une trentaine d’années, le même chemin que la Corée du Nord. Et il a réussi, d’un côté, à arriver au seuil de l’arme nucléaire et, d’un autre côté, obtenir la complicité des Etats Unis de M. Obama (qui a entraîné cinq autres pays dans l’aventure) pour se voir « renflouer » économiquement tout en ayant la permission de devenir puissance nucléaire dans, maintenant, six années. Son renflouement économique (annulation de sanctions, accès aux marché financiers et à quelques 150 milliards de $, etc.,) lui a permis, lui permet, de devenir une des puissances dominantes du Proche Orient.
En participant aux tueries de Syrie l’Iran vise deux objectifs : établir un couloir d’influence (directe ou indirecte) en passant par l’Irak et la Syrie pour arriver à la Méditerranée et se trouver sur la frontière Nord d’Israël. En attendant, elle a armé ses supplétifs de l’Hezbollah de plus de 100.000 fusées de divers type : exactement ce que la Corée du Nord a fait en plaçant plusieurs milliers de pièces d’artillerie sur la frontière avec la Corée du Sud, à 50km de Seoul. Moyen de déterrer toute velléité d’attaque contre ses installations.
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L’Iran est en train d’obtenir ce qu’il voulait bénéficiant ainsi de la complicité des deux superpuissances : la Russie qui s’est installé en Syrie et les Etats Unis qui ont décidé, pour des raisons qui leur sont propres de se désengager. Le premier objectif de l’Iran a été atteint : en accord avec la Russie, les Etats Unis ont quitté une importante position qui contrôlait un triangle « Syrie-Irak-Jordanie » et empêchait la constitution du « couloir » :
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tandis que la Russie amenait les iraniens (et leurs suppôts, le Hezbollah) à Quneitra, à 5 km du Golan « occupé » par Israël, permettant ainsi la réalisation du deuxième objectif de l’Iran.
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Tout cela dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu général que les Etats Unis et la Russie avaient concocté. Sachant ce qui allait advenir, Israël a fait valoir ses demandes (« pas d’Iran ni Hezbollah vis-à-vis du Golan »), mais ni la Russie ni les Etats Unis ne lui ont donné satisfaction. On avait seulement oublié qu’Israël avait détruit l’Osirak en 1981 et un réacteur irano-syro-nord-coréen en Syrie, en 2007. Ce dernier, aussi après avoir vu les Etats Unis ne pas vouloir le faire eux-mêmes.
Mais… on se souvient de l’histoire des armes chimiques de la Syrie… L’arsenal que la Russie a laissé entre les mains de M. Assad a continué de prospérer et, comme Israël le supposait, une partie des armes devait être fournies au Hezbollah. On avait oublié la « doctrine Begin » : dans la nuit de 7 septembre ledit arsenal (centre de recherches pour armes chimiques, de production de fusées de précision, etc.,) a été détruit par l’aviation israélienne « L'aviation de l'Etat hébreu aurait bombardé la ville syrienne où des armes non conventionnelles seraient fabriquées pour le Hezbollah » (Libé, 7 septembre). Ce raid israélien avait un triple objectif : détruire des armes destinées à des attaques contre le pays et faire comprendre aux deux superpuissances qu’Israël n’est pas un acteur inactif pour ce qui se passe en Syrie. J’ai dit « « un triple » - fournir la preuve à la Russie que tous les moyens de détection qu’elle a installé en Syrie (le S-400 par exemple, considéré comme « le meilleur système de détection existant aujourd’hui ») ne peuvent rien contre ses prouesses techniques.
Quelle leçon tirer de tout ce qui s’est passé ? Premièrement, que ni l’Iran ni la Corée du Nord ne renonceront à leur programme nucléaire comme suite à des « négociations » : les deux pays tromperont autant qu’ils pourront l’Occident qui, curieusement, se laisse faire. Que la seule méthode pour les faire renoncer à leur ambition nucléaire c’est faire comme Israël, qui suit depuis 1981 la « doctrine Begin ». Car, in fine, ce que l’Iran, d’une certaine manière et la Corée du Nord, d’une autre manière veulent c’est la destruction de l’Occident.