On a assisté, dans les dix derniers jours, à trois évènements qui n’ont pas fait - mais alors, pas du tout - la une des gazettes de notre pays. Remarquez, leur collusion (mot à la mode, surtout aux Etats-Unis) avec le pouvoir en place, leur orientation générale vers la gauche (si, si, même Le Figaro qui appartient à la famille Dassault – regardez la version «Internet»), leur collusion avec l’islamo-gauchisme (ou le gauchisme philo-islamiste), tout concourt à nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Et nous faire croire que ce qu’il y a de plus important au monde actuellement c’est la coupe de football féminin (que la France doit gagner, c’est sûr) ou la transhumance qui se prépare pour le week-end prochain quand ce n’est pas la canicule qui menace les vieilles gens.
Mais le monde n‘en a cure…
Pendant que l’on nous abreuve d’inepties, trois évènements méritent d’être regardés de plus près, leur influence sur ce qui se passera dans les années à venir étant loin d’être soupçonnée actuellement.
Pendant que… on assiste au commencement de la fin de la « démocratie turque » modèle Sultan Erdogan. Enfin, si l’on veut… car comment peut-on parler de la fin de quelque chose qui n’a pas existé ? Vanté par Mme Merkel et/ou Mme Mogherini, le Sultan a réussi pendant les dernières années un triple coup à l’extérieur de la Turquie : il a obtenu, par chantage, («je laisse passer les réfugiés syriens vers l’Europe» plus de 6 milliards d’euros (TRT 18.06.19), la reprise des négociations de l’adhésion de la Turquie à l’Europe (ce qui n’arrivera jamais mais, entre temps, la Turquie obtient de plus en plus de choses de l’Europe) et crée une compétition entre M. Poutine (qui veut lui vendre un système anti-missile mais aussi anti-OTAN…) et M. Trump qui se prépare à lui appliquer des sanctions (en lui refusant l’acquisition du F-35, le chasseur le plus avancé existant aujourd’hui - seuls trois pays en ont, l’Angleterre, le Japon et Israël). Mais pour qu’il y ait démocratie une condition nécessaire (mais pas suffisante…) c’est l’existence d’une économie de marché. Pendant des années, accédant aux fonctions suprêmes (par une élection truquée et, aussi, par l’organisation d’un « putsch » dont les conséquences ont été la décapitation des structures militaires, judiciaires et universitaires et la mise au pas d’une presse qui a été libre -avant de se trouver en prison…) le Sultan a troqué des investissements étrangers massifs contre un taux de croissance de l’économie qui rendait jaloux les pays de l’Europe. Mais… tout a une fin.
Et à l’occasion d’élections municipales de 2019 le Sultan perd le contrôle des principales trois villes du pays : Ankara (capitale), Istanbul (capitale économique) et Izmir (principale ville industrielle).
D’une certaine manière ce résultat a été influencé par quatre des facteurs économiques stratégiques :
- le taux de l’inflation et le taux du chômage :
- le taux de croissance de l’économie :
- l’évolution de la monnaie turque (livre) :
Certes, la Turquie du Sultan est un cas particulier : selon Philips, la courbe du chômage en fonction du taux d’inflation dans une économie de marché normale est une hyperbole descendante :
Ce que cette courbe nous apprend pour la Turquie c’est que le chômage restera à un niveau insupportable, l’inflation aussi et… la croissance de l’économie commencera à se trainer à des valeurs qui ne corrigeront ni le chômage ni l’inflation. La livre turque (qui a perdu 50% de sa valeur dans les deux dernières années) rabotera les revenus réels de la population qui…. chômage, inflation, dépréciation. Autant dire que l’avenir du pays du Sultan pourrait se rapprocher de celui de l’Argentine. Et l’Europe de Mme Merkel et Mme Mogherini (les deux, partantes, sans doute, à brève échéance) aura à supporter une partie des conséquences de leur politique absurde et de leur incompétence face au Sultan. Pourtant… la Turquie tout en étant membre de l’OTAN est amie (ouverte) de la Russie, (couverte) de l’Iran et pourfendeuse de tout ce qui est kurde (un peuple de 25 millions qui voudrait avoir un état mais dont les pays islamiques ne veulent pas).
Pendant que… notre Président va au Japon (va-t-il défendre M. Ghosn qui se trouve face à un système judiciaire moyenâgeux après un « putsch » dans son entreprise ?) un autre événement s’est passé au Bahreïn. Partie du plan de paix israélo-arabe que l’Administration Trump voudrait faire accepter à tous les intervenants, une conférence des « willing » vient d’avoir lieu. Très important ce qui s’est dit d’une manière cachée mais aussi très important ce qui s’est dit ouvertement.
Pour la toute première fois, le ministre des Affaires Etrangères du Bahreïn Khalid bin Ahmed Al Khalifa vient de faire savoir via Jerusalem Post (?!) : Bahreïn considère que l'atelier économique dirigé par les États-Unis qui se tient à Manama cette semaine est un possible "game changer" équivalent à l'accord de paix de 1978 Camp David entre l’Egypte et Israël » soutenant fermement le droit d’existence d'Israël. « Nous pensons que c'est très, très important", a-t-il déclaré au Times of Israël en soulignant également que son pays reconnaissait le droit d'Israël à exister, « qu’il était là pour y rester» en disant «Israël, historiquement, fait partie des héritiers de cette région. Des lors, le peuple juif a sa place parmi nous » (Times of Israël 26.06.19). N’empêche que … il est peu probable que le nouveau plan de paix ait un autre avenir que tous ceux ce qui se trouvent dans la poubelle de l’histoire depuis plus de cent ans et en particulier depuis 1967. La raison ? On le dira cent fois (sans aucun résultat) le conflit n’est pas territorial, il est religieux et, partant, existentiel. La preuve ? M. Abbas vient de déclarer « Nous ne serons pas les esclaves de Kushner, Greenblatt et Friedmann » (les trois émissaires américains en charge de la réalisation du fameux plan). Besoin d’une traduction ? Game changer ou pas … deux absents de marque à Bahreïn : les palestiniens et l’Europe (ne parlons même pas de notre pays). Pour les premiers c’est tout à fait normal : le mot d’Aba Eban garde son actualité : « les palestiniens ne perdent jamais l’occasion de perdre une occasion »
Quant à l’Europe …pendant que … tout d’abord elle n’a plus de direction opérationnelle après le grand succès des élections récentes et d’un autre côté elle ne sait pas comment se dépatouiller avec l’Iran qui vient d’annoncer qu’il ne respectera plus une des clauses essentielles du fameux JCPOA (enrichissement d’uranium vers seuil militaire). Ceci, surtout dans les conditions créées par les nouvelles, multiples sanctions décidées par l’Administration Trump.
Arrivés là (si vous avez eu la patience de lire ce qui précède) convenez que le football féminin et les embouteillages du week-end auront moins d’importance pour l’avenir du monde …