Le constat général est unanime. Il devient de plus en plus difficile de comprendre ce qui se passe dans le monde. Une pandémie, quelques dizaines de conflits armés sur au moins trois continents, des réfugiés qui abandonnent leurs villes, villages et lieux dits pour aller mourir en Méditerranée ou en Mer de Chine et, par dessus tout, des apprentis dictateurs ou des déjà installés comme tels qui font tourner la mayonnaise jusqu’à l’indigestion.
Confinés dans nos maisons et/ou appartements, comme nous le sommes, on regarde le spectacle donné par le monde surtout par la petite lanterne de la TV. Charité bien ordonnée commençant par soi-même… nous sommes forcés de regarder ce qui se passe car chaque événement instille des répercussions dans notre vie.
Quelques éléments géopolitiques s’imposent à tout observateur qui voudrait « comprendre » Surtout parce que ce qui pourrait surprendre pour notre pays c’est l’hyperactivité de notre Président de la République. Faut dire que les champs d’actions possibles pour qui a le loisir et les moyens de s’en occuper ne manquent pas. Et comme M. Macron a et le loisir (?!) et les moyens (?!) il est, donc, normal qu’il les utilise pour le bonheur du pays et, accessoirement, du monde. Laissons les généralités de côté, regardons de plus près certains de ses points d’intérêt.
Tout d’abord le Liban. La France a assisté à la longue chute de la « Suisse du Proche Orient » du rang d’un pays paisible où les fortunes du Proche et Moyen Orient rencontraient la civilisation européenne vers une entité composée de plusieurs clans religieux et, avec le temps, dominée, maîtrisée par le suppôt de l’Iran sur place, le Hezbollah. Alors que ces trente dernières années, pratiquement tous les pays du monde libre (et une partie du monde arabe) ont admis que ce dernier est une organisation terroriste, seule la France a maintenu (maintient) la fable de deux parties, une politique et l’autre militaire du Hezbollah. Et elle discute avec les politiques jusqu’au jour où a fait boum ! 2.750 tonnes de nitrate d’ammonium probablement (certainement ?) stockés par le Hezbollah pour ses attentats ont tué des centaines, blessés des milliers, réduit au rang de sans-abris 300.000 personnes (Ouest France, 05.08.20). Mais… Zorro est arrivé, et sans s’presser… Toutes affaires cessantes, notre Président est allé à Beyrouth et, faisons court, a demandé aux dirigeants (tous corrompus) du Liban (a) déterminer et punir les responsables du désastre et (b) changer de gouvernement en nommant un nouveau, non politique, en un mois. Brava Capitaine, ont applaudi les escrocs politiques qui avaient vu d’autres et, quand notre Président est revenu un mois après comme convenu, ni gouvernement, ni responsables punis : business as usual sous la botte iranienne habillant les pieds du Hezbollah. Qu’est-il allé chercher dans cette pétaudière qu’est devenu le Liban ? Un fardeau comme celui de Sisyphe car autant de fois qu’il essayera de refaire du Liban un pays normal, autant de fois il échouera tant que l’Iran et le Hezbollah en auront la mainmise.
Ensuite le Sultan, en route vers le rétablissement de l’empire ottoman. Ces dernières années la Turquie a envahi la Syrie, bombardé l'Irak, menacé la Grèce de forcer les réfugiés syriens, irakiens et autres, à traverser sa frontière, attisé les tensions à Idlib, signé des accords d’achats d’armes avec la Russie (à l’encontre de la volonté de l’OTAN dont elle fait partie), occupé des zones d’intérêt économique de la Grèce en Méditerranée, envoyé des armes et des mercenaires syriens en Libye pour occuper des pans du pays (surtout ceux qui recueillent du pétrole). Et récemment, fait savoir au monde entier qu’il soutient les terroristes du Hamas en accueillant ses dirigeants, encouragé la guerre entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie (qui crie à l’aide en rappelant le premier génocide du siècle dernier, commis par les turcs contre son peuple), condamné l’accord de paix Israël-UAE et continué de mettre en prison des journalistes et des politiciens de l'opposition. J’étais sur le point d’oublier : il vient de déclarer, à la stupéfaction du monde entier, «Jerusalem is our city» (Ankara, 01.10.20) tout en annonçant sa volonté de voir la ville libérée de l’oppression israélienne.
Mais Zorro est arrivé et sans s’presser (notre Président) est entré, de plein pied dans le chaos organisé par le Sultan. La France a envoyé deux frégates (le Charles de Gaulle est en essais post-arrêt technique de trois mois à Toulon) et deux Rafale à Chypre. Partisan de l’organisation multipolaire du monde, notre Président cherche des alliés pour faire reculer le Sultan. Le premier qu’il ait trouvé (si, c’est vrai !) c’est M. Poutine : allié de la Turquie en Syrie, adversaire de la Turquie en Lybie et en Azerbaïdjan, maître-chanteur de l’Europe (grâce à Mme Merkel et sa décision de devenir le premier client du gaz russe). Pauvre Monsieur Macron, un autre fardeau pour Sisyphe sur Seine.
Mais, il semblerait que notre Président est un adepte du billard à trois bandes (je ne sais pas exactement ce que cela veut dire mais je trouve que c’est bien dit !). Comme il n’est pas content de ce que M. Poutine va faire (ou fait) avec la Biélorussie (en danger d’être avalée comme la Crimée), avec grande prémonition il va faire un voyage de deux jours dans les Pays Baltes qui pourraient devenir des proies vu la détermination de M. Poutine à refaire l’empire soviétique (ou russe). Aller là, c’est un geste inamical pour M. Poutine. Mais billard à trois bandes oblige. Alors, d’un côté, il a prôné là-bas la nécessité pour l’Europe de s’armer avec des armes autres qu’américaines (éventuellement acheter français) et affirmé que la sécurité de l’Europe est en jeu là-bas aussi. Discours que ces pays écoutent d’une oreille distraite, convaincus qu’ils sont que le seul garant de leur sécurité n’est autre que l’Amérique. La mémoire collective se souvient de ce qui s’est passé et en Pologne et aux Pays Baltes. La sécurité de l’Europe ? Qui pourrait la menacer là ? M. Poutine ? Un signal donc envoyé à celui qu’il cherche comme allié par ailleurs. Si ce n’est pas le monde multipolaire je ne sais pas ce que c’est. Mais, après le Liban, après la Turquie, les Pays Baltes ? Anciennes possessions russes avant de devenir allemandes du temps des nazis qui s’y sont d’ailleurs très bien sentis, que cherche la France là-bas ? Un autre fardeau pour Sisyphe sur Seine ?
Pour ne pas fatiguer le lecteur je laisse de côté la Libye (où la France soutient, avec M. Poutine, un ancien général de Kadhafi contre le gouvernement reconnu par l’ONU et quelques pays européens) et, pour cette fois-ci, les tentatives aussi multiples que non réussies de prendre le leadership de l’Europe. Cela parce que le dernier fardeau qu’il s’est mis sur les épaules (pas comme Sisyphe mais avec le même résultat) nous touche tous de plus près.
Annoncé depuis quelques semaines il a prononcé un discours programmatique qui doit (devrait) régler, une fois pour toutes, le problème épineux de l’islam en France. Vaste programme…
M. Sarkozy avait décidé, lui aussi, de créer «l’islam de France» et a présidé à la création du Conseil du Culte Musulman. L’islam est toujours en France (non pas de France) et le Conseil entre les mains des Frères Musulmans (Qatar, Turks + Wahhabisme Arabie Saoudite). Et depuis 15 ans les choses n’ont fait qu’empirer, car si c’est le terrorisme qui l’a poussé à aborder ce sujet, à l’époque, il était exogène tandis que maintenant il est endogène.
De plus, rien ne changera car (1) plus personne ne croit que la République réussira à intégrer, assimiler, des populations non assimilables et (2) le fait que M. Macron a dit quinze fois (j’ai compté) qu’on mettra «des moyens» ce ne sont que des paroles verbales car on n’a pas le moindre sous. Franchement, quand on l’a entendu dire «on mettra ce qu’il faut de magistrats, de greffiers, une présence républicaine en bas de chaque immeuble» on ne pouvait que sourire en coin car il n’y a pas de magistrats ou des greffiers disponibles ni d’argent pour en former !
Mais là où on voit le ver dans le fruit, là où on comprend que c’est trop tard, c’est quand il parle du «terrorisme islamiste» - je commencerai à croire ce qu’il dit quand il parlera du «terrorisme islamique».
Certes, tous les musulmans ne sont pas terroristes mais jusqu’ici tous les terroristes le sont. Selon une enquête de PEW (2007 ?) dans plus de 50 pays où la population musulmane est importante, quelques 7% d’entre eux étaient sensibles aux thèses de Al Qaida ou de celles des fondamentalistes. Et 1/1000 d’entre eux prêts à passer à des actes. Regardez le calcul chez nous : 5 millions de musulmans (ou 6 ou plus), 350.000 (au moins) près de Al Qaida/fondamentalistes, 3,5 (disons 3 ou 4 prêts à l’acte). Toulouse, Charlie Hebdo/Supermarché Cacher : il y en a eu combien ?
Capito ? Tant que le terreau existe et que chaque génération nouvelle est moins intégrée que la précédente (d’après ce qu’il nous a dit), c’est écrit sur les murs, on n’est pas sortis de l’auberge. Un beau discours, il se trompe de constat, il n’a pas les moyens (gens, procédures, sous), et tant que l’on n’aura pas le courage de parler de l’islam non pas d’islamistes par peur des froisser les 5/6 millions de nos concitoyens musulmans qui vivent en France, rien ne changera. Mais il s’est donné quatre ans pour réussir à changer la France du tout au tout (il n’est Président qu’encore deux ans) ce qui est, sans doute, un fardeau de la taille de celui de Sisyphe. Ce qu’il n’a peut-être pas imaginé c’est que le sultan allait s’en prendre à lui : «Les déclarations de Macron selon lesquelles l'islam est en crise sont une provocation claire, qui dépasse le simple manque de respect. Qui est-tu pour parler de structurer l'Islam. C'est de l'insolence et c'est dépasser les bornes. Notre attente est de le voir agir comme un homme d'État responsable et non comme un gouverneur colonial» (Le Figaro, 06.10.20)
Le Sultan ? Qu’il cause … M. Macron il est, lui, sur la Seine et … rien d’impossible, n’est-ce pas ?