Cela fait trois semaines que le tonnerre manipulé par Monsieur Poutine a fait exploser la paix en Europe à coup de destructions barbares, avec leur cortège de réfugiés, dans un pays qui se croyait encore il y a un mois dans un état souverain de tranquillité (j’exagère à peine). Le criminel : M. Poutine – les complices, avant et après le déclenchement des hostilités, les dirigeants de l’Europe, premièrement, mais ceux d’Amérique aussi, bien sûr. Vous ne le croyez pas ? Regardez :
Qu’il me soit permis de paraphraser Erich Maria Remarque – A l’est rien de nouveau. Sauf que la Russie de M. Poutine a ressorti les livres de stratégie de l’armée russe et applique, mot à mot, ses préceptes. En clair, les avions et l’artillerie lourde, comme les missiles de croisière détruisent systématiquement tout ce qu’ils peuvent dans les villes de l’Ukraine. On cite souvent ce qui s’est passé à Grozny (Tchétchénie) rasée jusqu’à la terre. Mais l’illustration réelle de ce qu’est la vulgate permanente de la Russie pour la conquête d’un objectif, est sa capacité de destruction à Berlin, en 1945. 1.100 cannons en batteries (j’en sais quelque chose car un de mes beaux-frères en commandait une – il n’avait que 19 ans mais connaissait sa géométrie, pour régler le tir) ont tiré 1.800.000 obus sur la ville en dix jours ; … un million de civils terrés dans des caves... « La Chute de Berlin », Antony Beevor.c7 nov. 2002. Je reviendrai.
Si, si, quelque chose de nouveau, inimaginable il y a quelques années : l’ancien paria des Etats, Israël, parle aux deux principaux protagonistes qui, selon des déclarations officielles des intéressés, auraient donné leur accord pour que, le moment venu, la conclusion d’une paix se fasse à Jérusalem. Le Quai d’Orsay n’en revient pas et vous aurez du mal à trouver ce genre de nouvelles dans la presse française.
Israël. Je viens d’y passer quelques jours, premier séjour après la pandémie. Cela a été, toutes proportions gardées, un stage de rajeunissement et d’optimisme. Tout d’abord concernant le pays : profondément changé par rapport à mon dernier passage, une myriade de routes nouvelles (une seule payante) équipées comme en Suisse (!), des tours d’immeubles dans les grandes villes (Tel Aviv et Haiffa, mais pas seulement) et des banlieues, bijoux de propreté, de calme et de bien-être visible, des projets (réalisés) écologiques à profusion. Le tout disant clairement que les impôts collectés sont utilisés par l’Etat à bon escient, pour le bonheur, actuel ou futur, du plus grand nombre. Pays dont le PIB/habitant (44.945$ en 2022) est supérieur à la moyenne européenne (42.751$) et égal à celui de la France (44.770$). (Countryeconomy.com). Certes, Israël se trouve parmi les 5 pays les plus inégalitaires de l’OCDE, montrant un coefficient de Gini de 0,35 (0,3 pour la France) MAIS, le vieux fond social(iste) est toujours là et l’éducation est gratuite, la santé itou, le salaire minimum garanti est de presque 1.500 € net (1.481!) et les gens âgés, aidés de multiples manières, ne sont pas abandonnés. Conséquence de l’arrivée à la première position au monde « startup nation » qui (high tech, et services) emploie une population surtout jeune. Pays qui dépense presque 6% de son PIB pour sa défense (moyenne Europe 1,2%) depuis des années. Armée de conscription - école essentielle pour la formation intellectuelle, morale, civique. Bref, ce qui précède n’est que l’illustration de ce que ce pays est devenu et de son standing actuel dans le monde. Autant dire, « ce n’est pas par hasard qu’il peut parler, en étant pris au sérieux, aux deux belligérants »
Bien sûr, on n’est pas encore à faire la paix. L’armée russe déroule le manuel de son état-majeur, détruit tout ce qu’elle peut détruire sans distinction entre les russophones de l’Est du pays et les ukrainiens de l’Ouest. Sauf que « l’opération de police » lancée pour dénazifier et démilitariser l’Ukraine « I’m waging war to protect Russian-speaking people in Ukraine and bombing only military targets (M. Poutine, 09.03.22) qui aurait dû prendre 3 jours au maximum, entre dans la troisième semaine au grand dam de ce dernier. Et pourtant c’était le premier objectif assigné à l’armée russe. Le deuxième objectif était de démontrer les capacités et le professionnalisme de l’armée russe pour dissuader davantage les tentations des pays limitrophes ou plus lointains, en accroissant l’influence régionale de la Russie. Les deux objectifs étaient imbriqués. Pour le moment, en d’autres termes, il semble que Poutine ait fait une double erreur de calcul. Sa courte guerre victorieuse planifiée se transforme en un bourbier sanglant qui a scandalisé le monde, et sa fameuse forteresse économique de la Russie semble se diriger vers une dépression. Paul Krugman (Prix Nobel d’Economie) NYT, déjà le 04.03.22.
Naturellement, Monsieur Poutine veut terminer le travail qu’il a commencé en 2014 mais dont le résultat inattendu a été d’unir la société ukrainienne et renforcer son identité nationale. Il pensait que personne n’aller sonner le glas mais il oublia que « l’on ne peut pas se baigner deux fois dans la même rivière » (Héraclius). Comme il n’a pas intégré le fait qu’une éventuelle difficulté à obtenir ce qu’il souhaitait allait conduire à des coûts humains énormes et que des éventuelles sanctions qui seront appliquées par divers pays, affaibliront son régime de bas en haut et de l’intérieur et de l’extérieur. La Russie peut occuper l’Ukraine à grands frais humains mais aucun régime fantoche qu’elle installerait ne sera légitime ou stable. L’isolement international et la crise intérieure de la Russie s’intensifieront.
Alors ? Eh bien, il a choisi l’escalade.
Mais chaque fois qu’un échec se précise (durée, pertes chars d’assaut, avions, hélicoptères, soldats, etc.,) en Ukraine, l’escalade est à la fois la solution la plus risquée et elle laisse la Russie dans une situation pire. C’est cela qui a amené M. Poutine à lancer une menace nucléaire à peine voilée contre une participation extérieure au conflit. Je l’ai écrit depuis le commencement de la guerre, la Russie a perdu sa guerre en Ukraine même, et surtout, si elle occupe la totalité des grandes villes. Au plan militaire, en montrant au monde son impréparation logistique et tactique (compensée par le bombardement d’artillerie et/ou missiles de croisière ou autre type détruisant, surtout des cibles civiles), son incapacité économique à faire face à des sanctions inédites par leur diversité et profondeur, sa mise au ban du monde civilisé face à l’autoritarisme totalitaire qu’elle a laissé à son président. Peut-être, qu’après avoir détruit la majorité des villes ukrainiennes et fait fuir plusieurs millions d’habitants devenus des réfugiés du jour au lendemain, peut-être, elle s’arrêtera en se trouvant en situation d’occupant mais qui sera confronté à une guérilla urbaine. Le bon sens montre que pour tenir une ville on a besoin d’un soldat occupant pour sept habitants. Faites un calcul sachant que la population des 20 premières villes d’Ukraine (Wikipédia - villes avec plus de 300.000 habitants) est de 13,5 millions. Monsieur Poutine aura besoin, peu ou prou, de 2 millions de soldats occupants ! De plus, il n’est pas possible de soutenir une occupation dans un pays où l’occupant a bombardé des villes et des villages car une grande partie de la population sera contre. De plus, le « nazi juif » Zelensky n’a pas fui, il ne s’est pas rendu, et comme le combat se poursuit, le moral et la résistance des ukrainiens ne font que croître. Ils ont fait un effort patriotique national pour l’Ukraine et la résistance ne fera qu’augmenter. De plus, la Russie essaye de cacher la guerre à sa propre population et, ce faisant, elle a cédé l’avantage d’une information libre ce qui a permis à l’Ukraine de galvaniser le soutien occidental dans sa propre population. Beaucoup de gens en Russie commencent à se rendre compte qu’on leur a menti, et, à mesure que les cercueils commenceront à retourner dans les villes et villages russes, quelque chose se passera contre le régime. Ne l’oublions pas - M. Poutine a construit sa légitimité autour de l’idée de rétablir la stabilité, la prospérité et la position mondiale de la Russie. Il menace, actuellement, les trois aspects, la guerre en Ukraine est le plus grand test de son régime à ce jour.
La Russie a (aura) perdu la guerre. Mais, elle aura gagné la haine et le mépris des 45 millions d’ukrainiens pour les décennies à venir.
Et Monsieur Poutine constatera que même dans son régime autoritaire construit de manière telle à ce que personne ne puisse l’atteindre, il y aura un Brutus ou une révolte impossible de maîtriser. Et ce sera sa fin.
Cela étant posé, je ne veux pas occulter la responsabilité (ou l’irresponsabilité) des gouvernants du monde occidental. Non pas pour la promesse, jamais faite, de ne pas admettre une extension de l’OTAN à l’Est (comme il l’invente) mais pour l’irresponsabilité qui a été la leur quant aux relations avec la Russie. On nous bassine avec le concept « Europe jusqu’à l’Oural » évoqué dans un contexte totalement différent il y a soixante années. Comme avec le paradigme « une géographie commune, une histoire commune » Depuis des lustres, les politiciens de l’Ouest méprisent ceux de Pologne et des pays baltes chaque fois qu’ils sonnent l’alarme au sujet de la menace expansionniste posée par Monsieur Poutine. Ils se rendent maintenant compte qu’ils auraient dû écouter les pays qui connaissent beaucoup mieux le Kremlin et qui ont une amère mémoire historique de la violence que Moscou est prête à déclencher pour atteindre ses objectifs. (POLITICO Europe 09.03.22)
Ne nous cachons pas la vérité, l’Europe et ses principaux pays, ont adopté la voie de l’apaisement commercial et politique de M. Poutine, le tout sous la direction (autorité) (commandé par les intérêts de l’Allemagne) de Mme Merkel. Que ce soit l’Allemagne ou la France ou l’Italie ou Bruxelles, le partage de la responsabilité de la guerre portée par M. Poutine en Ukraine (comme auparavant en Géorgie, en Ossétie du Sud, en Crimée) leur revient comme un boomerang. Et ce ne sont pas les soi-disant sanctions « extrêmes » qui l’attenue. D’autant plus qu’en examinant lesdites sanctions on constate qu’elle n’entament en rien ni les achats de pétrole ou gaz ni les banques par lesquelles les transactions idoines sont faites. Et selon des calculs savants cela représente 60% du total des échanges commerciaux entre l’Europe et la Russie. Bravo, l’Allemagne ! Regardez : Les annonces faites à la suite du sommet européen vendredi à Versailles sont à titre particulièrement éclairantes : pas une restriction sur les importations de pétrole ou de gaz russes, ce qui signifie que Moscou conservera un confortable flux financier à même de financer beaucoup de choses. La seule nouvelle mesure économique annoncée par l'UE est une fin des exportations des produits de luxe vers la Russie ! Il faut relativiser l'importance de la mesure, étant donné que plusieurs groupes de luxe avaient déjà annoncé la fermeture de leurs points de vente. Mais sur le fond, ce sont la France et l'Italie qui en supporteront le coût, alors que l'Allemagne n'a pas annoncé la moindre restriction à la vente de ses machines-outils, bien plus liées à l'effort de guerre russe… Et c'est une mesure positive économiquement pour la Russie puisque cela limitera ses importations et améliorera sa balance des paiements. Le Figaro 15.03.22
Pauvre Monsieur Poutine… lui qui se croyait le nouveau Pierre le Grand, lui qui a envoyé ses armées ou ses mercenaires au Proche Orient, en Afrique, en Amérique du Sud comme ses prédécesseurs communistes qui voulaient faire la révolution partout dans le monde, avec les résultats connus il est, déjà, sujet aux caricatures les plus cruelles :