Sans vouloir interrompre la quiétude des vacances des lecteurs du blog, je réponds à plusieurs questions relatives à ce qui se passe chez nous et, surtout, par-delà les statistiques concernant les pertes et le temps perdu, en Ukraine/Europe.
Effectivement, l’été que nous sommes en train de vivre est inédit. A tel point que la phrase prémonitoire de Vladimir Bukowski « J’ai vécu votre futur et je vous dis que ça ne marche pas » (L'Union européenne, une nouvelle URSS ? 2005) ne résonne pas du tout curieusement pendant ce curieux mois d’août.
Curieux ? Essayons voir.
Tout d’abord chez nous. En laissant de côté les 15.000 hectares brulés (et le manque cruel de Canadairs), en laissant de côté les urgences des hôpitaux qui ferment à 20 heures par manque de personnel (et un mépris institutionnalisé pour les généralistes de ville – cf leurs consultations à 25 €), en laissant de côté ce qui se passe, tous les jours de la semaine dans les « territoires perdus de la République » notre attention s’est focalisée sur ce qui se passe à l’Assemblée Nationale. Ce qui se passe depuis que 79 députés, dûment élus par le peuple, jouent aux clowns et transforment l’amphithéâtre en champ de foire. En soulignant, fortement, qu’ils sont là pour « être pour tout ce qui est contre et contre tout ce qui est pour » Tout cela pour défendre les pauvres qui les ont élus et qui les découvrent. Ils ont quand même réussi (une partie d’entre eux) à remettre sur le devant de la scène ce qui les caractérise, un antisémitisme patent qui leur colle à la peau et dont ils sont incapables de se défaire. C’est la fameuse résolution visant à condamner Israël pour avoir mis en place « depuis 1948 (?!) » « un système d’apartheid systématique d’oppression et de discrimination avec l’intention de maintenir le contrôle d’un groupe ethnique-national-racial sur un autre » Signé par 35 députés de Nupes dont 21 communistes, y compris leur secrétaire général que l’on s’évertuait pendant la campagne pour les élections présidentielles de nous présenter comme quelqu’un de sérieux, de modéré, et d’une culture républicaine. Certains (la majorité de la classe politique ?) ont été surpris par le caractère clairement antisémite de ladite résolution. On ne devrait pas l’être car l’antisémitisme est bien ancré avec ses racines dans la gauche en partant de 1789, de la « Terreur » qui n’épargne pas les juifs, ensuite des philosophes de gauche Fourier (« le juif, parasite qui infeste…), Proudhon et Auguste Blanqui, jusqu’à Jean Jaurès (avant de devenir Dreyfusard…). Mais parler de « race » (juive, sans doute, qui oppresse la « race palestinienne ») on revient au temps de l’Allemagne nazie sous la signature de Monsieur Fabien Roussel. Et pendant que l’on perd son temps avec des ignominies sans nom, notre pays, il y a quelques années 5ème puissance économique mondiale est devenu sixième et maintenant septième.
Mais il y a pire. On ment. La facture énergétique, étant passée de 27 milliards d’euros au second semestre 2021 à 48 milliards au premier semestre 2022 (soit 21 milliards de plus) « le journal de référence » titre Le prix de l’énergie fait plonger le déficit commercial français à 71 milliards d’euros au premier semestre 2022 – (Le Monde, 05.08.22). On occulte le déficit structurel (50 milliards d’euros, exactement la moitié de celui de 2021) pour instiller, subliminalement, « voilà ce que nous coûte la guerre de l’Ukraine »
Regardez le résumé des puissances économiques du monde :
Le PIB mondial total est env. 100.000 Milliards $ ; au pro-rata des populations Israël (le blog s’appelle France-Israël) fait 40% plus que l’Europe, 25% mieux que la France (2,9% du PIB mondial, l’Allemagne 4,5 !), 8 fois mieux que la Russie, 5,5 fois mieux que la Turquie et seulement 20% moins bien que les Etats Unis. Ceux qui nous disent que nous nous trouvons sur une spirale descendante ne semblent pas avoir tort. Mais l’Assemblée Nationale a d’autres priorités et comme si le fait que la dette totale (publique + retraites fonctionnaires + « hors bilan ») dépasse 4.000 Milliards d’euros n’est pas suffisamment effrayant, on vote des augmentations du pouvoir d’achat, inflationnistes, bien sûr (car ne résultant pas d’une productivité accrue ou d’une production de valeur en augmentation). Et on continue à nous parler de voitures électriques (hors de prix) en oubliant qu’un programme visant à convertir le transport à l’électricité - sans programme en avance pour disposer d’une production d’électricité idoine n’est rien d’autre qu’un vœux pieux. On me dira que notre Président s’est engagé dans sa campagne présidentielle à mettre en marche un programme visant la construction de 14 réacteurs EPR (1.570MW) jusqu’en… 2050.
Mais on veut que la moitié du parc automobile actuel (plus de 20 millions) soit transformé en électrique jusqu’en 2035 ! Des calculs simples (puissance consommée par voiture moyenne) conduisent à évaluer à 5 ou 6 réacteurs nucléaires le nombre nécessaire pour assurer le fonctionnement du parc électrique. En plein essor de la construction de réacteurs nucléaires en France (années 70/80) avec une filière (qui n’existe presque plus aujourd’hui) on mettait entre 5 et 7 ans pour un groupe de PWR de 900MW. La construction d’un EPR en Finlande a pris 18 ans… celui de Flamanville commencé en 2007 sera mis en marche (on espère) en 2023 soit après16 ans …
Ainsi va la vie dans notre beau pays depuis quelques dizaines d’années. On parle, on promet et puis on passe aux affaires courantes.
L’affaire courante actuelle s’appelle l’Ukraine. Rappelez-vous, pendant sa campagne électorale pour la présidence des Etats Unis, M. Biden a tenu des propos durs au sujet de la Russie - « Poutine sait que, lorsque je serai président des États-Unis, ses jours de tyrannie et ses tentatives d’intimider les États-Unis et les pays de l’Europe de l’Est sont terminés. » (9GAG – The Planet, 2019).
Curieux, non ? M. Poutine a pris peur mais… cela ne l’a pas empêché de lancer son opération spéciale et tenter de « dégommer » le gouvernement de Kiev en trois jours en occupant une grande partie de l’Ukraine. Au cours de la crise avec l’Ukraine en 2014, M. Poutine avait déclaré qu’il avait « 1,2 million de soldats armés de l’armement le plus sophistiqué du monde » et que, s’il le voulait, « ils pourraient être à Kiev en deux jours ». Depuis 2014, l’armée russe a été renforcée, n’est-ce pas ? Comment se fait-il que nous soyons maintenant, pratiquement, six mois après l’« opération spéciale » et il n’y a pas de perspective visible pour un gouvernement ami de la Russie à Kiev ?
M. Poutine a également déclaré (25.02.22) que son objectif dans la guerre était de « démilitariser et de dénazifier l’Ukraine ». Six mois après, la démilitarisation a manifestement échoué car des armes occidentales se déversent, tous les jours, dans le pays. Et si la dénazification signifie établir un régime conforme, projeter une sphère d’influence ou, comme certains le suggèrent, détruire la démocratie en Ukraine, l’échec de la Russie est total. La haine et l’hostilité des ukrainiens envers la Russie vont bien durer des décennies.
Corrompus, mal dirigés et sous-motivés, les militaires russes ont été repoussés de Kiev par des Ukrainiens beaucoup moins bien formés et équipés. Tous les gains russes dans le sud-est de l’Ukraine ont été accomplis en pulvérisant le territoire à distance, puis en prenant en charge les décombres pratiquement, totalement, dépeuplés.
Mais… Les agresseurs potentiels ne pourront s’empêcher de remarquer les coûts élevés que la guerre a imposés à la Russie en termes de pertes humaines, de pertes économiques et d’isolement international. L’économie kléptocratique de la Russie était déjà en déroute depuis une dizaine d’années, et la guerre de Poutine, même si elle s’arrête, d’une façon ou d’une autre, aliénera probablement les clients et les investisseurs éventuels au moins aussi longtemps qu’il sera aux commandes — et probablement beaucoup plus longtemps.
Les agresseurs potentiels peuvent également noter que même si Poutine peut s’accrocher à ses gains territoriaux en Ukraine, il devra les reconstruire, les subventionner pour les gouverner. Ils auront du mal car les forces russes semblent enclines à commettre des actes brutaux qui accroissent l’hostilité à l’égard des occupants étrangers. Ils n’ont pas tenu en Afghanistan (pays de moins de 10 millions d’habitants) ils ne tiendront jamais en Ukraine (pays de 45 millions d’habitants. (International Affairs Forum, 05.08.22)
Ce que la Russie de M. Poutine fait en Ukraine, au vu et au su du monde entier (sauf d’une majorité de russes qui n’ont que la censure de M. Poutine comme source d’information vu le régime totalitaire qu’il a mis en place) ne fait aucun doute quant au fait qu’il s’agit de la destruction d’un peuple, de sa culture, de son patrimoine et de sa langue, ce qui est une preuve supplémentaire de l’intention de la Russie non seulement de briser une nation, mais de détruire tout ce qui en fait une nation. Et le mot pour cela est « génocide » (selon la définition de l’inventeur du mot, R. Lemkin, 1946). Mot que les dirigeants de l’Europe n’ont pas le courage de prononcer ni celui de dire à leurs peuples que ce de quoi il s’agit aux confins de l’Europe préfigure le futur que M. Poutine (la Chine, la Turquie, l’Iran aussi) voudrait nous préparer.
Et si on place nos espoirs en l’Europe, la poétesse roumaine Ana Blandiana nous avait avertis : Il est évident que dans le choc implacable des civilisations, l’Europe va perdre non pas parce qu’elle n’a pas de ressources, mais parce qu’elle n’a pas la foi. Et je ne parle pas seulement de la foi en Dieu, bien que ce soit évidemment ce dont il s’agit, mais simplement du pouvoir de croire en quelque chose. L’affrontement entre celui qui croit fermement en la vérité de sa foi, aussi aberrante que puisse être cette vérité, et celui qui doute de la vérité de ses idéaux, aussi brillants soient-ils, se terminera toujours par la victoire du premier. (Discours Docteur HC, Cluj – 2016)