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3 septembre 2022 6 03 /09 /septembre /2022 07:44

Selon Monsieur Poutine, l’opération militaire spéciale est, en réalité, un conflit entre la Russie et l’OTAN chacun visant la domination mondiale. Quelle est la situation actuelle ?« La Russie a perdu 48.700 soldats, 12 généraux, 2009 chars, 3 navires, 234 avions et 7.500 camions. L’OTAN n’est pas encore arrivé »

Le poète russe Alexandre Pouchkine en écoutant Nicolas Gogol lui lire un passage du roman Les Ames Mortes, à un moment donné, éclate de rire et se met soudain à réfléchir et dit, avec désespoir, « Mon Dieu, notre Russie est si triste » (AAEL-JP-23.07.22). Il y a presque 200 ans mais la Russie est toujours encore plus triste.

 

Car on doit convenir que les pires choses que M. Poutine fait le sont à son propre peuple. Raconter (et obliger, le peuple d’accepter sous risque de prison) que la guerre qu’il a déclenché en Ukraine est une « opération spéciale» : tromper les recrus envoyés au combat lorsqu’ils pensaient qu’ils allaient faire des exercices d’entraînement, les équiper avec des armes datant des années soixante, les laisser chercher de la nourriture pendant les combats, abandonner les corps des morts sur place, ne pas dire à leurs familles qu’ils sont morts, adopter des lois qui empêchent les Russes de découvrir la vérité ou de dire la vérité, arrêter et/ou tuer des dissidents, détruire l’économie russe pour des décennies, faire fuir plus de 4 millions des meilleurs et des plus brillants jeunes Russes, détruire les plans et les rêves d’une génération, tout en se prenant pour Pierre le Grand et se donnant l’objectif de reconstituer l’empire russe de son temps et j’en passe et des pires. Pauvre peuple russe – Pierre le Grand a poussé la Russie vers l’avenir, M. Poutine la pousse vers son plus misérable passé.

S’agissant d’un bilan il faut regarder les deux tableaux, le russe et l’ukrainien.

 

Les forces russes ont rendu environ 45 000 km2 de territoires depuis le 21 mars (date estimée de leur avancée la plus profonde en Ukraine), une zone plus vaste que le Danemark. Comme l’a déjà évalué l’ISW, les forces russes ne sont pas en mesure de traduire des gains tactiques limités en succès opérationnels plus larges, et leurs opérations offensives dans l’Est de l’Ukraine stagnent. (ISW 25.08.22). On se souvient que l’abandon honteux de l’offensive pour prendre Kiev a conduit à une pause, supposée pour refaire les effectifs et les doter de nouvelles armes. Depuis que la Russie a repris les opérations offensives après cette pause, le 16 juillet, les forces russes ont gagné environ 450,84 km2 (environ 174 miles carrés) de nouveaux territoires, une zone d’à peu près la taille d’Andorre. Comparez le Danemark avec l’Andorre. Pendant les six mois écoulés depuis le début de la guerre, selon des sources ukrainiennes, données corroborées en partie par ORYX et/ou le ministère de la Défense d’UK, l’armée russe aurait perdu 

 Le Pentagone estime les pertes militaires de la Russie à 70.000 morts et blessés. Dans la seconde moitié de juillet 2022, la CIA estimait les pertes russes à 15.000 morts et 45.000 blessés. A fin août des responsables occidentaux de la défense estiment que plus de 80.000 soldats russes ont été tués et/ou blessés depuis le début de l’invasion. Par-delà le nombre, la tendance à grande pente positive laisse comprendre que les pertes russes loin de s’arrêter continuent : la formation des nouveaux recrus doit en être une cause majeure comme la stagnation actuelle de l’armée russe sur des positions défensives fixes plus facilement attaquées par des HIMARS et autres équipements de précision (CESARS).

 

Selon diverses estimations, la guerre en Ukraine coûte à l’économie russe environ 1 milliard de dollars par jour (soit env. 180 milliards de $ pour les six mois), et le déficit budgétaire du pays pour juillet s’élevait à 879 milliards de roubles (env.10 milliards euros - le salaire moyen mensuel en Russie était en 2021 de 32.422 roubles, soit env. 390 $) car les recettes de la TVA ont chuté de plus de 40% . Le secteur bancaire russe a perdu pendant le premier semestre 2022 1,5 trillion de roubles (24,8 milliards de dollars - taux le plus élevé du rouble car contrôle des changes…), a déclaré vendredi un haut responsable de la Banque centrale.

Pour que la deuxième armée du monde (selon des estimations anciennes…) fasse montre de tels résultats ne doit on pas se demander quelles en sont les causes ?

1. Monsieur Poutine croyait que l’armée russe était forte et invincible. En réalité, les forces mises en marche étaient des « militaires Potemkine » dont la logistique et les équipements se sont montrés inadéquats (euphémisme).

2. M. Poutine ne s’attendait pas à ce que les Ukrainiens se battent ou se rallient autour de leur identité nationale. Bien que lui il croit que l’Ukraine n’est pas un vrai pays, les Ukrainiens ne sont apparemment pas du tout d’accord.

3. M. Poutine croyait que la grande dépendance du monde, surtout de l’Europe, au gaz naturel et au pétrole de la Russie rendrait celle-ci imperméable à toutes éventuelles représailles occidentales.

4. M. Poutine croyait que l’Europe et l’Occident étaient trop divisés pour organiser une réponse forte et unifiée. C’était peut-être la plus grave erreur de calcul de M. Poutine.

(mise en forme de Big Think, Dr. A. Berezow, Washington University- 31.08.22).

Croire ce qu’il croyait, sans boucle de « feed back » de ses proches ou des échelons militaires (regardez la photo…)

car « à la table du Tzar on n’apporte pas des mauvaises nouvelles » - vieux proverbe russe - il a envoyé une armée de 200.000 soldats (gardés « en exercice » de novembre 2021 au 24 février de cette année) conquérir la capitale Kiev et l’Ukraine en trois jours. Les pertes évoquées ne sont que le résultat militaire des erreurs majeures identifiées plus haut.

 

Mais, sa conviction que la dépendance du monde au gaz naturel et au pétrole de la Russie tenait celle-ci à l’abri de toute surprise peut se comprendre. Alors même que les missiles pleuvaient sur l’Ukraine, des pays comme l’Allemagne, dont la dépendance du gaz naturel russe frisait l’absurde, n’étaient pas, pour dire le moins, enthousiastes à punir la Russie. Bien que, en 2018, le pelé, le galeux, je veux dire DJT, disait : https://twitter.com/nowthisnews/status/1044740334306058241 (cliquez et regardez aussi les mines moqueuses des délégués allemands pendant son discours).

Les quatre erreurs majeures évoquées plus haut ont eu leurs répercussions sur le plan économique, aussi, bien entendu.

 

Des chercheurs (Yale University, Investment Monitor 26.07.22) ont déterminé que le statut de la Russie en tant qu’exportateur de biens avait chuté significativement et que ses importations s’étaient contractées de près de 50%. Selon leur étude, le pays est loin de pouvoir répondre à ses propres besoins, par exemple, en matière de fabrication de biens de consommation.

 

Dans le secteur de l’énergie, la poule aux œufs d’or du régime, les affaires ne sont pas comme d’habitude non plus. En juillet, les recettes provenant des exportations de gaz et de pétrole se sont resserrées de 29 %. Moscou joue la menace de l’approvisionnement en gaz contre l’Europe tandis que son pétrole russe est soumis à un embargo occidental qui sera total en décembre (sauf pour la Hongrie et quelques autres pays. Certes, la Russie s’est tournée vers les marchés de la Chine et l’Inde, et était heureuse de constater qu’il y avait une demande, mais elle n’était que temporaire et imposait une réduction massive du prix des fournitures : par exemple 30$ le baril de pétrole quand il était livré à l’Europe autour de 80-100 ! De plus, l’exode des entreprises les plus prestigieuses quittant la Russie est une blessure qui, aussi dure qu’elle puisse être aujourd’hui, aura des conséquences majeures pour le pays pendant des années (ou des décennies). Les revenus tirés des plus de 1.000 entreprises qui ont réduit ou mis fin à leurs activités en Russie équivalent à environ 45 % du PIB de la Russie.

 

Mais M. Poutine qui ne voulait pas voir l’OTAN à sa frontière Ouest (avec l’Ukraine, longue de 1.581 km) a obtenu le contraire en lançant sa guerre : La Suède et la Finlande (dont les armées sont les -ou parmi les- meilleures en Europe) ont décidé d’adhérer à l’OTAN et la Russie va avoir l’OTAN sur 1.340 km au Nord de l’Ukraine !  De plus, il a réussi ce que personne sensée ne croyait possible (notre Président parlait de la « mort cérébrale de l’OTAN ») unifier l’l’Europe avec son allié transatlantique, les Etats-Unis, dans une cause commune, revigorer l’Alliance avec l’arrivée de deux pays militairement, presque, inégalés en Europe, changer la politique « pacifique » de l’Allemagne qui vient de décider d’affecter 100 milliards d’euros à la modernisation de son armée et faire comprendre au monde entier que la Russie est entrée dans une période de glaciation pire que celle d’avant la Perestroïka. Tout cela parce qu’il a voulu démentir le proverbe (du temps des Soviets) « l’avenir est certain, le passé seulement est imprévisible » Et le passé… souvenons-nous de G. Orwell « Celui qui contrôle le passé contrôle l’avenir. Celui qui contrôle le présent contrôle le passé »

 

Le tableau ukrainien est plus simple : le pays n’a pas perdu (et on ne voit pas pourquoi cela changerait) la guerre, au contraire, le monde entier est (plaisamment ?) surpris par son comportement qui l’a conduit à plusieurs succès. Les raisons sont multiples. Tout d’abord, l’incompétence stratégique, tactique et logistique de l’armée russe, son incapacité déconcertante à obtenir une supériorité aérienne précoce (ni encore aujourd’hui), la formation au combat et le moral des troupes bas, ont tous joué un rôle. Tout comme le soutien occidental à l’Ukraine et la ténacité des soldats du pays entraînés depuis 2014 par des militaires occidentaux et sachant ce pour quoi ils se battent. Mais ces explications ne disent pas toute l’histoire. L’armée ukrainienne mérite d’être reconnue non seulement pour la motivation de ses troupes, mais aussi pour son savoir-faire technique. Elle a utilisé des technologies de pointe et adapté les capacités existantes de nouvelles façons créatives, sur et hors du champ de bataille cinétique. On oublie que l’Ukraine était le sous-traitant préféré des sociétés européennes pour l’informatique, la cyber sécurité, les productions métallurgiques spéciales, les composants d’avionique et encore plus. Fabriquant elle- même des armements développés (roquettes, missiles, drones, etc.,) et connaissant, à fond, les armes et les doctrines russes (hérités de l’Union Soviétique). Certes, l’influx inimaginable avant le mois de février d’armes modernes en quantités importantes, venant essentiellement des Etats Unis, Angleterre, Pologne, Norvège… et un (très) peu de France se révèle essentiel pour, au départ, la résistance des Ukrainiens et, maintenant, leurs tentatives de récupération de territoires perdus.

 

Inimaginable jusqu’au moment où M. Zelensky s’adressant aux dirigeants européens (mars 2022) en demandant leur aide leur a dit « c’est peut-être la dernière fois que vous me voyez vivant» Dirigeants européens dont, une partie (MM. Macron, Scholz, Draghi) cherche  toujours  une  porte  de  sortie  pour       M. Poutine pour qu’il ne perde pas la face (?!), une partie (Finlande, Pays Baltes, Angleterre) qui soutient à bout de bras l’Ukraine et qui n’arrive pas à comprendre pourquoi notre Président parle encore, et  encore,  et  encore  à         M. Poutine (en n’obtenant absolument rien depuis six mois) et une partie qui fait tout pour faire capoter les sanctions prises contre la Russie (Hongrie principalement mais aussi la Slovaquie et même l’Autriche).

 

Il me peine de l’écrire mais… notre Président est pointé du doigt en Europe pour ses négociations sans résultat avec M. Poutine, la fin de notre aventure au Mali et son peu d’empressement pour faire rendre gorge à l’Iran avant de lui concéder des avantages inconcevables pour la signature d’un nouveau JCPA qui, en réalité, lui donne l’accès à la bombe en 2025 ou 2030. Quant à l’Ukraine, il accepte que l’on ne fasse rien pour qu’elle avance dans sa quête de justice pour les crimes de guerre commis par la Russie sur son territoire et/ou de dédommagement pour des centaines de milliards d’euros de dommages. Même après six mois de guerre, notre Président accepte que l’Occident n’offre rien de réel à l’Ukraine en termes de garanties de sécurité permanente. Mais il parle à M. Poutine. Pourquoi ?

 

 

 

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