Le temps passe… Il fût un temps quand le 1er mai, à Paris, voyait le cortège des partisans du vieux M. Le Pen aller faire pèlerinage devant la statue de Jeanne d’Arc. Cette année, le 1er mai, nous dit-on, verra un million de travailleurs manifestant contre la « réforme des retraites » et, in petto on nous avertit que ce ne sera pas de toute tranquillité. Car en plus des syndicats on verra à l’œuvre destructrice tout ce qui conteste la République, les black blocs, les antifa et autres nervis de l’extrême gauche.
Naturellement, nous sommes dans un pays de droit. Où après moultes manifestations, concertations, discussions… une Assemblée Nationale n’a pas démis le gouvernement qui a décidé, contre le sentiment de 70% des français, de promulguer une réforme qui vise de retarder de deux ans le départ à la retraite pour la majorité (avec des aménagements pour beaucoup de cas sortant de la « norme ») et la disparition - à terme - de la totalité des « régimes spéciaux » (par exemple ceux dont les cotisants partent aujourd’hui à 52 ou 55 ou 57 ans !). Nous sommes dans un pays de droit et il est supposé que ce qui passe par l’Assemblée nationale et n’est pas invalidé par le Conseil Constitutionnel devient la loi du pays. Pour tout le monde, de droite, de gauche, syndicats, associations, citoyens valides ou invalides, bref, tout le monde doit s’y soumettre. Sauf à croire que
Eh, oui. On a oublié que le peuple souverain - au pays de la révolution de 1789 - sait, depuis (et même d’avant – voir les jacqueries) oublier l’état de droit et revendiquer ce que bon lui semble. Surtout s’il s’agit d’avantages acquis, n’est-ce-pas ? Il suffit de voir qui porte l’étendard de la désobéissance pour le comprendre :
Les trois catégories les plus « actives » - SNCF, EDF et RATP - fer de lance des mouvements anti-réforme depuis plus de trois mois sont ceux dont les retraites sont 3 à 4 fois plus grandes que celles des agriculteurs. Tout en pouvant partir à la retraite 5 à 10 ans plus tôt que les pauvres du «régime général». Ce sont aussi ceux qui professent l’idiotie « faut prendre aux riches pour financer les retraites » quand le gouvernement explique que la réforme est nécessaire pour (a) financer les retraites actuelles et celles à venir et que (Edward Whitehouse, direction de l'Emploi, du Travail et des Affaires sociales) aujourd'hui l’âge de départ qui est de 62,5 ans pour les hommes et 61,1 pour les femmes, s'établira à près de 65 ans pour tous en 2050. Dans plusieurs pays de l'OCDE, il sera même supérieur : 67 ans en Allemagne, en Australie, au Danemark, aux États-Unis, en Islande et en Norvège, et 68 ans au Royaume-Uni. L'Irlande et les Pays-Bas envisagent aussi sérieusement cette option. Regardez ce que la France dépense et ce qu'elle dépensera : deux fois plus que la moyenne de l'OCDE actuellement, 50% de plus que la moyenne en 2050 (c'est demain!) :
Et si l’on ne croit pas le gouvernement, serait-il impossible d’expliquer au peuple que notre pays ne produit plus autant de richesses que nécessaire pour financer (i) l’enseignement qui produit tous les ans 20% des élèves sortant du circuit éducationnel sans savoir, véritablement, lire/écrire ou calculer, (ii) un système de santé (jadis réputé le meilleur du monde) qui ferme des lits - normaux, d’urgences, des maternités et des hôpitaux provinciaux - par manque de personnel et de ressources, (iii) une défense qui en cas de guerre (ou pour aider l’Ukraine) ne disposerait de munitions que pour trois jours (CNews, le Sénat, 15.03.2022) ? Serait-il, réellement, impossible que le peuple le comprenne ? Que nenni !
Ce peuple qui se voulait instruit, cultivé, créateur d’une langue ciselée pendant des siècles et qui a tenu le haut du pavé, ce peuple est aujourd’hui réfractaire à la simple raison. Pourtant on lui a déjà dit (François Fillon, 21.09.2007) que l’état était en faillite. Certes, mais comme des années auparavant on lui avait dit aussi (M. Giscard d’Estaing, apocryphe, 1976) « la France n’a pas de pétrole mais elle a des idées » Et quelle idée avons-nous exploité ? L’endettement.
Tant et si bien qu’aujourd’hui la dette comptable du pays (3.000 milliards d’euros) représente 116% du PIB (66,4% pour l’Allemagne) et la dette totale (y compris les 5.000 milliards d’euros « hors bilan » est équivalente à 254% du PIB ! Mais qu’à cela ne tienne, on nous dit toujours que quand c’est mal chez nous c’est pire chez les autres. Souvenez-vous, depuis trois ans (20.01.20) concernant la sortie de l’Angleterre de l’Union Européenne on nous raconte (pour nous rassurer quant à notre présence dans l’Union) l’avenir apocalyptique de la perfide Albion. Diantre.
Regardez (Trading Economics) – avec un nombre d’habitants quasi identique l’Angleterre dispose d’un PIB de 6% supérieur, d’un chômage presque deux fois plus bas que celui de la France et d’un endettement de 10% inférieur à celui de notre pays. Il y a vingt ans le PIB/habitant de la France était 20% supérieur à celui de l'Angleterre, aujourd'hui il est inférieur de presque 10%. Et pour le départ à la retraite… au Royaume-Uni, hommes et femmes peuvent partir à la retraite à 66 ans. (Au Portugal à 66 ans et 7 mois. En Belgique aussi cet âge est fixé à 65 ans mais doit passer progressivement à 66 ans en 2025 et 67 ans en 2030. Au Danemark, l'âge légal de départ est de 67 ans mais doit passer à 68 en 2030 – Google, Vie Publique).
Pourquoi, diable, croit-on que le peuple ne pourrait pas comprendre que par delà les «revendications» des inconscients il y a des faits qu’il est impossible de changer ?
Et l’enseignement ? Il y aurait à écrire des tomes entiers pour raconter comment on a détruit un système à nul autre égal qui faisait la fierté de la nation. Mais nous sommes le premier pays au monde libre qui s’est approché du socialisme à grand pas : donner tout, à tout le monde, tout de suite. D’un côté en admettant dans le pays des millions d’êtres fuyant le leur ou venant pour bénéficier d’une manne distribuée larga manu sans besoin d’apporter une contribution équivalente, d’un autre côté en mettant au centre du système non pas l’enfant à éduquer mais l’éducateur (mal payé) qui, par ses représentants, gère un ministère unique au monde, troisième employeur mondial après les armées chinoises et russes. Une comparaison ?
Presque deux fois plus d’élèves dans une classe qu’en Italie (!) avec des enseignants payés presque deux fois moins qu’en Allemagne. Pourtant le pourcentage du PIB affecté à l’éducation est de 7% en France et seulement de 4,7% en Allemagne (Banque Mondiale – 2020). Et les résultats sont là : Seuls 53,4 % des élèves atteignent le score moyen de « fluence » qui, en fin de CM2, doit conduire les élèves à lire 120 mots et plus par minute. Ils sont même 15,4 % à ne pas atteindre le score attendu en fin de CE2 (90 mots lus en une minute) et 31,1 % présentent des fragilités (entre 90 mots et 120 mots par minute). Plus grave encore, dans les quartiers prioritaires, deux tiers des élèves ont des difficultés à lire. Un constat très ennuyeux, qui s’avère même alarmant. Les Echos 10.11.2020.
Et pour les maths ? 30ème pays parmi le 31 de l’OCDE, la France réputée auparavant pour l’excellence de son école mathématique pendant des lustres.
Eh oui, mais chez nous des éducateurs mal payés, sont absents du circuit l’enseignement général et technologique, avec un taux annuel moyen de 4,7 %, qui varie entre 2,4 % (octobre) et 9,6 % (mai). Dans les lycées professionnels, le taux d'absentéisme est en moyenne sur l'année de 15,6 % et varie de 11,5 % à 24,1 % (Min. Education Nationale, 09.03.2022).
Qui croit encore à la devise de cette ville Fluctuat nec mergitur ?