Des lecteurs (plus nombreux que d’habitude) me font savoir que, selon eux, mon dernier texte ne traduit pas la vraie, difficile, improbable, situation de notre pays et ne sont pas loin de me dire que je n’ai rien compris à la crise réelle dans laquelle notre pays a été plongé.
Je m’insurge !
Ne t’affole pas Gustave,
Si tu veux t’instruire un peu
Tu n'as rien à faire de mieux
Que m’en écouter mon brave (J. Moiziard)
Tout d'abord les faits. Le 9 juin notre Président (Narcisse ? Néron ? Psychopathe ?) époustoufle le pays annonçant, au peuple, la dissolution de l’Assemblée nationale : "J'ai décidé de vous redonner le choix de notre avenir parlementaire par le vote ». Le 24 juin (Le Monde) « il parle d’un risque de guerre civile » Pompier pyromane, il nous laisse pantois, mais explique (Le Monde, il y a trois semaines) « qu’il voulait une clarification » Premier tour des législatives le 30 juin, la clarification demandée a été obtenue : peu ou prou, 47% des votes exprimés en faveur de la droite, 27% en faveur de la gauche et 23% en faveur de la « Macronie ». La droite (majoritairement RN), la gauche (d’un « triple fiché S » à un ancien Président de la République) les deux avec des programmes économique, social et régalien pouvant faire peur à tout un chacun préoccupé par le devenir du pays. Mécontent de la clarification obtenue Narcisse (Néron ?) demande au peuple de ne pas laisser la droite (RN) arriver au pouvoir. La gauche, une partie de la droite, la « Macronie » décident de le suivre laissant de côté les programmes des uns et des autres, « no pasaran » étant le cri de ralliement.
Deuxième tour des législatives, le RN (et associés) obtient 37% des votes exprimés, la gauche 26,3% et la Macronie 24,7% mais, beauté du spectacle, RN et associés n’obtiennent que 142 mandats, la gauche 188 et la Macronie 161. Pas besoin d’être politologue certifié, l’Assemblée nationale est ingouvernable. Dimanche dernier, vous avez appelé à l’invention d’une nouvelle culture politique française nous dit-il, Lettre aux Français, 10.07.24. La France a maintenant une Assemblée nationale tripartite où les trois groupements (NPF, Macronistes et RN), sont à un kilomètre de la majorité absolue de 289 députés, et ce dans le cadre d’un système politique qui, depuis 66 ans, n’a pas connu une once de culture de compromis ou formation d’une coalition arc-en-ciel durable de style européen. Bigre, cette nouvelle culture on l’a connue, à profusion, tout au long de l’existence de la quatrième République ! La gauche et le centre n’ont obtenu qu’un quart des voix chacun, mais chacun a fini avec plus de sièges que la droite. En bref, l’alliance de la gauche et du centre était suffisante pour garder le pouvoir hors des mains de la droite, mais ce ne sera pas suffisant pour gouverner. La France est maintenant en terre politique incognita et personne ne sait ce qui va se passer ensuite. Mais le cœur des pleureuses nous fait savoir que « la France est en crise ».
Le psychopathe est non seulement content de sa victoire à la Pyrrhus mais fait savoir qu’il ne fera rien (nommer un Premier Ministre, former un gouvernement) tant que l’Assemblée nationale n’aura réglé ses formalités de fonctionnement interne. Hypocrisie, tu chantes ton nom. Hypocrisie, hommage que le vice rend à la vertu. (François de la Rochefoucauld)
Bon, peut-être que la Ve République a dépassé son délai de péremption. Après tout, depuis 1789 (origine de la plus grande partie des impostures sanglantes connues depuis), la France a connu deux empires, trois monarchies, cinq républiques et a eu 16 constitutions différentes. Crise ? Quelle crise ? A l’exception des « années folles » (les 20 après 1900 et après JC) qui ont suivi une guerre absurde qui lui a fait perdre 1,3 millions d’hommes (multipliez par 3 pour avoir le nombre de blessés) et les 30 glorieuses (après une occupation allemande de quatre ans et l’utilisation de quelques milliards de $ américains - Plan Marshall - pour commencer son renouveau industriel, scientifique, militaire) à quel moment la France n’a-t-elle pas été en crise ? Alors, parler de crise aujourd’hui, comme un d’évènement exceptionnel peut paraître, un peu, exagéré. D’un autre côté, que nous est-il arrivé ? Au cours des dernières décennies, l’ancienne grandeur de Paris a perdu son emprise sur le monde géopolitique. Elle a, au sein de l’Union européenne, cédé à l’Allemagne sa position de leader économique et politique. En fait, elle a perdu, en faveur de l’Europe (voire l’Allemagne) une grande partie de l’autorité nécessaire pour affecter son développement interne ou externe. En d’autres termes, la crise prolongée de la Ve République a atteint un stade où le manque de volonté politique pour résoudre ses nombreux problèmes, depuis longtemps attendu, se transforme en crise.
On sait que l’on doit changer, mais il semble vouloir le faire sans rien changer. C’est la raison pour laquelle Mark Twain disait « Les politiciens et les couches doivent être changés souvent, et pour la même raison »
J’ai écrit victoire à la Pyrrhus. La situation créée par la manœuvre du Président a ouvert le champ du possible pour l’arrivée de la « gauche » au pouvoir. Les clowns du NFP peuvent imaginer qu’ils mènent un glorieux combat contre la résurgence du fascisme en empêchant le RN d’arriver au pouvoir. Mais la vérité est que la grande majorité de la France « d’en bas » qui vote maintenant pour le RN ne le fait pas parce qu’ils sont racistes ou néonazis ou essaient de saper la République. Ils le font parce qu’ils sont préoccupés par l’immigration non contrôlée, l’islamisme rampant, le « greenisme » et leur marginalisation, confrontés comme ils sont à des partis politiques – de gauche et de centre – qui refusent de traiter ces questions, somme toute, fondamentales. La gauche française, quant à elle, se trouve dans la position inconfortable de mener la charge contre cette expression de la désaffection et de la colère de la classe ouvrière, le NFP tirant largement sa propre base de soutien d’un côté, de la bourgeoisie des villes/métropoles et, d’un autre côté, des "territoires perdus de la république" en clair, le nouveau prolétariat d’obédience musulmane. Cette nouvelle « lutte des classes » ne va nulle part. Plus les préoccupations du peuple sont occultées, plus sa révolte grandira.
Tout au long de la campagne électorale, on a parlé d’un front commun virtuel entre la coalition du président (Ensemble) et l’extrême gauche Nouveau Front populaire des communistes, socialistes, verts et France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. Si une telle coalition voit le jour, à la prochaine élection présidentielle, si le RN joue ses cartes intelligemment, comme il le fait depuis quelques années, sera une alternative conservatrice modérée à une tour de Babel contenant le centre informe et les 25% de ce qui restera comme gauche française -l’extrême gauche, le tout totalement inacceptable pour le pays. Surtout puisque M. Macron n’a pas de successeur visible qui pourrait impressionner le pays, son parti étant susceptible de se désintégrer aussi rapidement qu’il l’a agglutiné de nulle part il y a sept ans et parce que le RN est mieux placé qu’une coalition de gauche ressemblant à un cercle carré. Pour l’instant la France n’a pas pu avoir un gouvernement du RN. La question est ouverte de savoir si la France peut avoir un gouvernement dans un proche avenir. Ce qui fait dire à un de mes amis « pour les trois prochaines années, l’État français se portera bien, surtout qu’il ne pourra rien faire » En espérant que l’analyse de Bloomberg qui a montré que la dette en pourcentage du PIB augmenterait à près de 130 % du PIB en 2027 si le Nouveau Front populaire appliquerait son programme, ou à 120 % pour le RN et, seulement, à 110 pour cent sous le gouvernement sortant de M. Macron est incorrecte. The Telegraphe, 10.07.24.
Curieux n’est-ce pas ? Pas tellement quand on se souvient que, pendant les élections 80% de l’électorat a voté pour des programmes qui prévoyaient une sérieuse augmentation des déficits budgétaires, donc de la dette. Sans se rendre compte qu’une telle approche ne peut être supportée par un système à monnaie unique. On devrait se souvenir de la Grèce et de ses sacrifices pour rester dans l’euro. Depuis 10 ans notre dette augmente plus vite que le PIB : recette infaillible pour arriver à une cessation de paiements ou rendre vraie la formule de M. Fillon (2007) « état en faillite ». Sommes-nous totalement inconscients ou irresponsables (le cumul …) ? On devrait comprendre que l’économie de l’Union européenne ne peut pas fonctionner si son deuxième plus grand constituant (PIB, après l’Allemagne) n’a aucune perspective réaliste de croissance ou de remboursement de sa dette. La France ne peut pas non plus espérer contribuer de manière significative à la défense commune de l’OTAN vu la guerre en Ukraine sans un démarrage économique, que les partis de gauche n’envisagent pas de prendre dans le cas (on espère improbable) où ils auraient la haute main sur les finances du pays.
Entre temps… la rentrée scolaire est prévue pour le mois de septembre, on sait que la majorité des enseignants a voté pour La France Insoumise : Le premier jour d’école, l’enseignante explique à sa classe qu’elle était socialiste « insoumise ». Elle a ensuite demandé aux élèves de lever la main s’ils l’étaient eux aussi. Voulant impressionner leur professeur, tous les élèves ont levé la main sauf une petite fille. Le professeur regarda la fille avec surprise, "Amélie, pourquoi n’as-tu pas levé la main ? Parce que je ne suis pas une socialiste insoumise, je suis une républicaine et j’en suis fière, a répondu Amélie. L’enseignante ne pouvait pas en croire ses oreilles. "Amélie s’il te plaît, dis-nous pourquoi tu es républicaine ?"Parce que ma mère est républicaine et mon père est républicain, donc je suis républicaine aussi !"Eh bien ! dit l’enseignante d’un ton manifestement agacé, ce n’est pas une raison pour être républicaine. Et si ta mère était une idiote et ton père un crétin, que serais-tu alors ? Amélie sourit, c’est facile, je serais une socialiste insoumise !
J’ai écrit victoire à la Pyrrhus. Notre Président (Narcisse ? Néron ? Psychopathe ?), sauf miracle, le sera encore trois années. Et le pays ?
Les processus irréversibles de l’économie ont commencé avec la crise mondiale de la fin des années 2000 et ont progressivement conduit à des problèmes communs en Occident : érosion de la classe moyenne, déclin de la population et, par conséquent, diminution de la capacité de l’État à maintenir un système d’obligations sociales. Pour respecter ses obligations, la France n’a vu que deux options viables : le financement par emprunt et l’immigration.
L’incapacité à résoudre ces problèmes sociaux et économiques structurels, combinée à la destruction de la structure traditionnelle de la société suite à la désindustrialisation massive, a conduit à une crise au sein du système politique interne de la France. Les partis traditionnels de la gauche politique (socialistes et communistes) et de la droite politique (républicains et « extrême droite ») sont maintenant dangereusement proches de la « désorganisation organisationnelle ».
Les problèmes qui affligent la République française sont structurels, c’est-à-dire qu’ils sont totalement intégrés dans son système social, économique et politique. Aucun montant supplémentaire de dette ou de procrastination ne suffira à sortir la France de son bourbier actuel. Des mesures économiques et donc politiques difficiles doivent être prises maintenant et pour longtemps, si la France veut surmonter son malaise politique. Ceci est impératif si elle espère retrouver le sens de son importance dans l’orbite des affaires mondiales. (Sokalinfo, Ukraine, 11.05.24).
Bon, encore trois années. Choisir des dirigeants comme EM qui nous chante dans l’oreille que tout va bien et que nous sommes attractifs pour le monde entier ne changera rien. Un président français incapable de gouverner son propre pays et qui n’est pas en position de diriger l’Europe – son ambition. Il est, comme on dit au Texas, all hat and no cattle. Des larmes et du sang… mais qui va le demander ?