Texte mis en ligne par Liberty Vox
Les bons, les brutes et les truands
A en croire le battage partisan auquel se livrent la famille, le gouvernement français et la presse française, comme d’habitude, on est porté à croire que la libération des 15 otages des FARC en Colombie a été le résultat de leur « lutte pour la liberté ». Et si les premiers mots de la franco-colombienne Ingrid Betancourt ont été pour remercier l’armée colombienne, en revanche, les rejetons français n’ont pas daigné prononcer le nom du président de la Colombie comme s’ils avaient peur que cela leur brûlerait la langue …
Certes, la libération de cette femme politique colombienne -française par un mariage suivi d’un divorce- a eu une grande importance pour ses enfants et sa mère. Sachant cependant qu’elle avait quitté la France après son divorce d’avec son mari, diplomate français, pour se lancer dans la bataille politique en Colombie, devenir sénateur, solidement ancrée dans la gauche locale, elle qui descend d’une famille de la grande bourgeoisie colombienne, on pourrait se poser la question « que fait la France dans cette affaire » ?
Certes, dans le discours d’inauguration de la présidence Sarkozy la libération d’Ingrid Betancourt était annoncée comme un objectif prioritaire. Pas exactement comme l’augmentation du pouvoir d’achat des masses laborieuses mais … en bonne place. Comme, d’ailleurs, la libération des infirmières bulgares des geôles du Colonel Kadhafi. Mais, déjà depuis 2002, date du kidnapping de Mme Betancourt, la France était le pays le plus en pointe pour œuvrer en faveur de sa libération. Les élites, de droite et de gauche -comme Monsieur de Villepin ou des leaders socialistes- ne pouvaient pas laisser tomber une ancienne (petite ?) amie et/ou condisciple d’études, tous s'étant trouvés en même temps sur les bancs de Sciences Po. Si ce n’était que cela …
Mais ce n’était pas que cela. La France, adepte de l’apaisement et de la discussion avec des terroristes de partout, avec un zèle digne de causes plus nobles, a pris pratiquement le parti des kidnappeurs contre le pouvoir démocratique de la Colombie. Par delà les épisodes burlesques (avion militaire de transport envoyé à Manaus, au Brésil, sans prévenir les autorités brésiliennes …) ou le déroulement des tapis rouges pour le clone vénézuélien de Fidel hissé au rang de « négociateur » avec les terroristes, la France demandait à l’Etat Colombien d’accepter les revendications d’une bande de narcotrafiquants, à l’origine « guérilla marxiste ». La France demandait, plus ou moins ouvertement, à la Colombie de démembrer son territoire pour accorder un sanctuaire d’environ un tiers de la superficie du pays aux preneurs d’otages mais qui gardaient leur logo de « révolutionnaires marxistes ». Et aussi de céder aux revendications diverses et multiples de ces bandits abrités par la jungle depuis 40 années. Mais qui avaient, d’un côté, le support matériel des autres « socialistes » d’Amérique Latine (Venezuela, Equateur, Bolivie en particulier), et de l’autre, celui des gauches mondiales car le président de la Colombie est un homme de droite …
Pendant de très longues années la diplomatie française s’est complu dans une danse du ventre devant les FARC et devant Hugo Chavez jusqu’à y compris proposer comme monnaie d’échange pour la libération d’Ingrid Betancourt, l’accueil en France de quelques 500 « guérilleros » condamnés par la justice colombienne et se trouvant dans les prisons du pays.
Objectif prioritaire de Nicolas Sarkozy, terrain de prédilection pour le spécialiste humanitaire de la gauche recyclé à la droite (Bernard Kouchner, pour préciser) il était tout naturel que cette affaire devienne une grande cause française. Et à ce titre, disposer d’un énorme panneau sur le parvis de l’Hôtel de Ville à Paris grâce aux bons soins de M. Delanoë (qui préfère les grandes causes et son militantisme socialiste au nettoyage de Paris, devenu une des villes les plus sales de l’Europe). Et pour remuer les bons sentiments du bas peuple, on a diffusé une photo de l’intéressée en très piteux état et l’on a fait savoir que si elle n’était pas libérée elle risquait la mort à brève échéance. En disant aussi, à mots couverts, que dans ce cas-là le responsable serait le président colombien qui ne voulait pas abdiquer de ses principes lui interdisant de négocier avec des terroristes visant la destruction de son état. Pendant ce temps, la famille française (les deux enfants, mais aussi « l’ex ») se répandaient dans toutes les radios et télévisions de France et de Navarre pour dire pis que pendre du président colombien. Par delà l’amour filial, par delà l’absolue normalité de la défense d’un être opprimé, ceux qui réclamaient la libération d’Ingrid Betancourt occultaient la responsabilité des FARC et l’ignominie de leurs actions et arrivaient à faire un transfert (voir le Père Freud …) qui n’était pas moins ignoble. Avec l’assentiment des élites françaises et du gouvernement du pays.
Il y a encore trois semaines Bernard Kouchner, devenu voyageur habituel (en première classe …) du trajet Paris – Caracas, allait voir Hugo Chavez pour « faire avancer » le projet de libération d’Ingrid Betancourt. Remarquez, on s’occupe à titre humanitaire uniquement d’Ingrid Betancourt mais on va voir celui qui a alimenté en armes et des centaines de millions de dollars les bandits kidnappeurs. Mais toute action, toute politique se juge aux résultats.
Le résultat ? Une action des forces spéciales de l’armée colombienne libère, sans tirer un seul coup de feu, 15 otages des FARC dont Ingrid Betancourt. Et on voit dans les premières images de cette dernière filmées par la télévision colombienne qu’elle pleure et sourit quand elle raconte l’épisode de sa libération, comme si c’était le script d’un film d’action … Et, nonobstant ses positions politiques, elle a l’élégance de remercier non seulement Dieu mais l’armée colombienne et le Président de la Colombie, se considérant elle aussi comme un soldat de son pays.
La presse mondiale (pas encore la française qui, elle, est à tresser des lauriers à l’action de la France, des associations de supporters et de tous les signataires de pétitions diverses) commence à jeter un peu de lumière sur cette action d’éclat de l’armée colombienne. Et, comme on sait, on ne prête qu’aux riches, à ceux qui les ont aidés. Etats-Unis et Israël.
Etats-Unis. Il y avait trois otages américains mais ils ne valaient pas la peine de s’y intéresser pour les combattants de la liberté français car ce n’étaient que des « mercenaires » utilisés pour la lutte anti-drogue en Colombie. Sans bruit, sans pétitions, sans portraits sur l’hôtel de ville de San Antonio au Texas, les Etats-Unis ont aidé la Colombie en formant leurs forces spéciales et en leur fournissant les équipements nécessaires. Jeudi, le colonel William Costello, porte-parole du commandement SUD des Etats Unis, a indiqué qu’ils « ont cherché leurs otages pendant les cinq dernières années, tous les jours, en effectuant 3.600 vols de surveillance et de reconnaissance au-dessus de la jungle et qu’ils ont dépensé plus de 250 millions de $ pour cela ».
Israël. Tout en soulignant que le mérite de l’opération appartient à la Colombie, des sources israéliennes nous apprennent que des dizaines d’experts israéliens y ont participés et que les actions ont été coordonnées par un ancien chef d’état major « opérations » du Tsahal (Israel Ziv) qui est rentré de Bogota à Tel Aviv … hier. Remarquez, déjà en mars 2008 quand la Colombie a détruit, en territoire équatorien, une base des FARC où se trouvait leur Numéro 2 (mort dans l’action) Hugo Chavez y voyait la main d’Israël … Comme quoi il n’a pas toujours tort … Pourquoi Israël ?
La participation israélienne a commencé il y a dix-huit mois, quand la Colombie a demandé à Israël de l'aide dans sa lutte contre les FARC, spécialisées, comme on le sait, dans le commerce de narcotiques et le kidnapping pour obtenir des rançons. Auparavant, Israël avait déjà vendu à la Colombie des avions avec et sans pilotes (drones), des armes et, surtout des systèmes perfectionnés utilisés pour la collecte de renseignement. Par exemple, ce qui a permis de se substituer au téléphone satellitaire du nouveau commandant suprême des FARC pour donner l’ordre au geôlier en chef de rassembler trois groupes d’otages au même endroit … Des anciens membres du Mossad ou du Shin Beth sont allés sur place pour contribuer à la formation des forces spéciales colombiennes.
Pendant ce temps, les structures politiques colombiennes, en commençant par le président du pays, tenaient bon face aux imprécations de tous les biens pensants qui leurs demandaient de céder aux FARC. Et assumaient leur volonté de ne pas se soumettre, ni aux vendeurs d’air fussent-ils des français de droite ou de gauche ni à ceux qui voulaient la destruction du pays pour en constituer un nouveau paradis communiste.
Juste avant que Nicolas Sarkozy -hommage du vice à la vertu- remercie Alvaro Uribe et l’armée colombienne pour la libération des otages, on avait l’impression qu’Ingrid Betancourt avait été libérée grâce aux actions des médias, de la famille et du gouvernement français. Mais on a pu observer, qu’une fois le discours du président passé, la vulgate dominante est restée la même … Et pour souligner l’implication de la France, les enfants français du soldat colombien, accompagnés du toujours disponible Bernard Kouchner, partent dans un Airbus spécialement loué vers Bogota pour embrasser leur mère. Qui reviendra avec eux aujourd’hui en France. Quand on aime on ne compte pas mais, sans être pingre, on devrait se dire que par les temps qui courent cela doit faire beaucoup l’embrassade …
Ingrid Betancourt « rentre » en France. Pourtant elle a quitté ce pays, qui n’était qu’un intermezzo dans sa vie, pour se lancer dans la vie politique de son vrai pays, la Colombie. Elle voulait devenir sa présidente nonobstant le 1% des voix dont elle était créditée par les sondages quand, à ce titre (et non pas comme une vulgaire touriste) elle a été kidnappée par des bandes d’assassins pires que la lie de la terre. Mais qu’auparavant elle est allée voir pour les convaincre de participer à la création d’une nouvelle Colombie …
Il est humain de se réjouir de la libération d’un être des mains des assassins. Il ne peut pas être indifférent de voir à quel degré d’absurdité la diplomatie française (et ses patrons) est arrivée.
Si, au départ, on savait qui étaient les bons et qui étaient les brutes (rôles inter-changés dès la libération des otages) il n’était pas clair qui étaient les truands. Depuis hier on le sait. Au fait, qu’et-il devenu, Monsieur Chavez ? Allons, le colonel Kadhafi nous avait déjà fait comprendre que nos gouvernants ne sont que des sinistres plaisantins …