L’Afrique noire est mal partie
René Dumont, 1962
Texte mis en ligne par LIberty Vox le 12.12.08
Il y a, presque, 50 ans, un des premiers écologistes français (bien avant l’avènement des partis « verts ») a lancé au monde un cri d’alarme : après la décolonisation, les tentatives d’installer en Afrique des républiques populaires et socialistes gouvernées par des partis uniques, ne pouvaient que se révéler, toutes, désastreuses. Et il a mis en garde autant l’Afrique que l’Occident que ce qui attendait l’Afrique c’était soit la famine soit l’état de mendiant de l’aide internationale.
Son constat était simple et les résultats de ses prévisions se sont vérifiés au fur et à mesure du temps qui passait. Il suffit de regarder le graphique qui suit pour réaliser que l’Afrique de 222 Millions d’habitants en 1950 voit sa population augmenter depuis de presque 5 fois (1 Milliard en 2010) pendant que sa production alimentaire propre n’augmente que de 2,7 fois. Et en 2020 l’Afrique aura 1,2 Milliards d’habitants (six fois plus qu’en 1950) avec une production alimentaire propre qui n’aura augmentée que d’environ trois fois.
Malthus avait déjà expliqué, il y a plus de 200 ans (Essais sur le Principe de Population) que les ressources alimentaires de la planète ne s’accroissant que selon une progression arithmétique tandis que les populations augmentant selon une progression géométrique, sauf facteurs « correcteurs » puissants (guerres, pandémies, etc.,) vient un moment où la famine se pointe à l’horizon.
Ce qui s’est passé en Afrique, avec la complicité de l’Occident et l’irresponsabilité des africains est le résultat d’un cumul jamais rencontré dans l’histoire de l’humanité : croissance exponentielle de la population, absence de pandémies dévastatrices (pratiquement depuis la distribution de DDT après la deuxième guerre mondiale), des guerres uniquement larvées créant misère mais moins de morts que par le passé et la transformation d’un continent en abonné à l’aide internationale, aide qui le maintient en vie. Et, en parallèle, la destruction des moyens de production alimentaire (agriculture) comme résultat de politiques raciales et/ou « socialistes » portées par des tyrans sanguinaires se maintenant au pouvoir avec l’aide de l’Occident ou de l’Orient (Russie et/ou Chine).
Malgré l’aide financière et matérielle considérable dont bénéficie l’Afrique depuis des décennies, l’écrasante majorité de la population continue de vivre dans des conditions de grande misère et de détresse. En 1960, l’aide à l’Afrique représentait, déjà, 1,38% du PNB français, 0,56% au Royaume-Uni, 0,88% en Belgique en ne regardant que les pays ayant disposé de colonies.
Cela étant, depuis 50 ans, on observe une relation négative entre la valeur de l'aide internationale reçue par un pays et son taux de croissance. De 1970 à 1999, 17 pays de l’Afrique Sub-Saharienne ont reçu plus de 100 milliards de $ d'assistance de la Banque Mondiale. Pourtant leur PNB/habitant y a diminué. En 50 ans, les Etats Unis ont donné 500 milliards $ aux pays pauvres, sans qu'on observe de progrès du niveau de vie. De 1987 à 1998, l'incidence de la pauvreté s'est accrue en Afrique. La moitié de la population y gagne moins d'un dollar par jour ; le taux de mortalité infantile est de un sur dix (1999). Mais en Asie, de 1980 à 1990, la Chine et l'Inde n'ont bénéficié que d'une infime portion d'aide internationale (4% et 7% de leur PIB respectif) ce qui ne les a pas empêché de jouir d'un taux de croissance fulgurant de leur économie.
L’Afrique n’est pas pauvre par la faute de la richesse des riches. La pauvreté et la faim n'ont rien à voir avec la redistribution du revenu mondial. Elles découlent, l'une et l'autre, de l'ineptie et de la rapacité des gouvernements en place, deux constats qui ne font pas partie du vocabulaire « politiquement correct ». Par la faute des gouvernements locaux, l'aide internationale ne fait que susciter une dépendance généralisée ; elle aboutit en bonne partie dans les comptes bancaires des potentats locaux protégés par les instances politiques (gouvernements, partis, élites intellectuelles et industrielles, etc.,) des pays donateurs. Pays donateurs, se trouvant pour l’essentiel être ceux de l’Europe, des Etats Unis et du Japon. La Russie ? La Chine ? Elles vendent des armes à des pays africains en guerre et, la Chine, devient le deuxième investisseur du continent surtout dans les pays de grande misère (Soudan, Zimbabwe, Guinées, etc.,) et colonisateur s’il en est.
Depuis 1960, les pays riches ont consacré près de 5000 milliards de dollars US au développement international. Malgré cela, les Nations unies rapportaient en 2003 que près de la moitié de l’humanité vivait avec moins de 2 dollars US par jour. Après 50 ans d’aide internationale, où en sommes-nous ?
Le magazine Parade (2006) a publié son classement des vingt plus ignobles dictateurs encore au pouvoir. Les noms les plus familiers : Fidel Castro, Kim Jong Il, Robert Mugabe, Omar al-Bashir. Ils se sont tous rendus coupables de violations des droits de l’homme, voire dans certains cas de génocide. Un point commun unit ces dirigeants : chacun d’entre eux a reçu des importantes aides au développement en provenance de pays occidentaux.
Omar Al-Bashir, le dictateur soudanais, se trouve en tête du classement. Pendant son règne, les pays de l’OCDE ont distribué plus de 6 milliards de dollars d’aide non militaire au régime soudanais, ce qui ne l’empêche pas de fricoter avec la Chine (qui empêche toutes sanctions pour le génocide au Darfour car il y a du pétrole au Soudan), faire ami-ami avec l’Iran qui attend que le pays tombe dans son escarcelle comme un fruit mûr, le tout avec la bénédiction tacite de la Ligue Arabe qui n’en peut mais. Les USA y ont contribué pour plus d’un milliard de dollars. Kim Jong Il est deuxième au classement et a reçu plus d’un milliard de dollars, dont plus de la moitié en provenance des USA. Robert Mugabe du Zimbabwe fait partie du «top 5» de cette liste. Les Etats-Unis, à eux seuls, lui ont apporté plus d’un milliard de $.
L’Afrique a été le principal bénéficiaire de l’aide internationale. Pourtant, l’Afrique compte toujours le taux le plus élevé de mortalité infantile. Sa durée moyenne de scolarisation, avec 1,6 année en 1992, était la plus courte du monde. Depuis le taux de scolarisation n’a fait que baisser avec des rares exceptions (Ethiopie, Guinée Bissau, par exemple). La part de l’Afrique dans la production mondiale est de moins de 2 % (1,7 %) bien que sa population représente 15% de celle mondiale. Une vingtaine de pays africains sont engagés dans des conflits civils ouverts ou larvés, ce qui lui vaut plus de 6 millions de réfugiés et 17 millions de déplacés à l’intérieur de leur propre pays. Enfin, selon les données de la Banque Mondiale, la moitié de la population de l’Afrique sub-saharienne vit depuis l’an 2000 dans une pauvreté absolue.
Afrique noire – espérance de vie à la naissance par pays.
L’aide internationale n’a donc pas réussi à favoriser la croissance économique en Afrique. De 1970 à 2000, plus de 400 milliards de dollars ont été déversés dans les pays les plus pauvres d’Afrique sans que ceux-ci enregistrent de progrès notables. La liste des dictateurs cités rend ce constat encore plus dérangeant car non seulement les aides n’ont pas réussi à favoriser le développement, mais de plus, presque partout, elles ont soutenu des régimes particulièrement oppressifs.
Les états en cause sont subventionnés parce que leurs sujets sont pauvres, et c'est à eux d'allouer ensuite les fonds. A moins de faire preuve d’angélisme et de croire que les hommes politiques et la bureaucratie chargés de distribuer les aides ne sont préoccupés que par le bien-être des citoyens, on doit bien réaliser que l’aide n’est rien d’autre qu’une source de revenus pour eux. Ils sont ainsi encouragés à éviter les réformes qui pourraient avoir pour conséquence de soulager durablement la population, puisque le financement international devrait alors s'arrêter. Cet effet pervers de l’aide internationale à l’Afrique est lui aussi interdit de cité par le politiquement correct.
Qu’à cela ne tienne, l’Europe a décidé d’accroître l’aide à l’Afrique : 25 milliards d’euros pour 2010 et 38 milliards d’euros pour 2015. Et notre pays se targue d’être le deuxième contributeur européen pour l’aide à l’Afrique … Et plus personne ne se souvient des glas qui suggéraient de donner des sous à la Corrèze plutôt qu’au Zambèze …Ni de la rupture annoncée par Nicolas Sarkozy pendant sa campagne présidentielle. Rupture avec «la France-Afrique» de triste mais de longue mémoire (Foccart sous De Gaulle et Pompidou, le «fils» sous Mitterrand, ensuite Chirac, père nourricier de Bongo et alea) ? En guise de rupture on a sacqué, à la demande de deux ou trois dictateurs africains, le socialiste ministre de la coopération…
Il faut bien admettre que les aides déversées sur le continent noir ont comme résultat que la population africaine se multiplie à une vitesse jamais et nulle part ailleurs constatée dans l’histoire de l’humanité. Elle est passée de 130 millions d’individus en l’an 1900, à 780 millions en l’an 2000 et atteindra au moins 2200 millions à la fin du siècle présent. En dépit de la pandémie du SIDA et malgré les famines dues à la désertification provoquée par des hommes transformés en assistés de la communauté mondiale (moins les pays arabes, naturellement). Il faut savoir que le taux de fécondité en Afrique noire est encore de 7 à 8 enfants par femme en âge de procréer en moyenne. Certains croient, bien à tort, que les ravages de l’épidémie du SIDA vont casser ce dynamisme démographique. En réalité, à part quelques pays particulièrement touchés comme l’Afrique du Sud et le Zimbabwe, ce désastre sanitaire n’empêchera pas la population de l’Afrique Noire de continuer à s’accroître très rapidement : elle va presque tripler d’ici 2050, passant d’environ 750 millions en 2000 à près de 2 milliards d’habitants. Un pays comme le Nigeria - déjà plus de deux fois la France aujourd’hui - verra sa population dépasser les 300 millions, soit autant à lui seul que toute la zone Euro.
Mais, parler de l’Afrique au moment où la crise financière de l’occident fait ravages autant dans les économies développées que dans celles en état de développement peut paraître incongru. Il y a une raison majeure, d’actualité, elle s’appelle le Zimbabwe et l’épidémie de choléra qui y sévit depuis quelque temps.
Le Zimbabwe est le stéréotype de la faillite du continent africain : un pays qui, jusqu’en 1986, était un des greniers de l’Afrique a été réduit à la mendicité en une vingtaine d’années par un dictateur qui s’est maintenu au pouvoir avec l’aide de ses voisins immédiats (Afrique du Sud) et la complicité pendant de longues années des « pays socialistes » (Russie, Chine, Cuba, en particulier) et de certains pays arabes (Libye surtout).
Deux graphiques sont particulièrement parlants :
Regardez bien le changement d’allure des graphiques : l’année importante est 1986, l’année d’arrivée au pouvoir de Robert Mugabe. Depuis cette année-là, l’Indicateur du Développement Humain amorce sa descente implacable et l’espérance de vie à la naissance amorce sa descente autant implacable : de 62 ans à moins de 40 ans actuellement. Mais, avant 86 le pays s’appelait la Rhodésie du Nord et plus de 200.000 fermiers blancs avaient développé une agriculture sans équivalent en Afrique noire (sauf en Afrique du Sud du temps de l’apartheid ...). Révolution politique, révolution agraire et distribution des terres aux supplétifs de Mugabe, expulsion des blancs (il en restent quelques milliers) et le résultat est là : le Zimbabwe vit de l’aide alimentaire depuis plus de dix ans. Son produit national brut descend de plus de 600 $ (courants) en 1986 à environ 300 $ en 2006. Le pays dépense 42 $ par an et par habitant pour la santé. Ce qui ne l’a pas empêché d’acquérir de la Chine en avril 2008 une cargaison d’armes et munitions pour 100 millions de $ …
Le choléra ? Oui, 9000 cas recensés par les autorités locales et presque 750 morts. L'ONU estime que 60 000 Zimbabwéens pourraient avoir contracté le choléra qui ne s’arrête pas au fleuve Limpopo, frontière naturelle avec l’Afrique du Sud, et menace maintenant ce pays. Il faut savoir que, selon des sources dignes de foi, les deux tiers des Zimbabwéens ont quitté leur pays pour aller, pour l’essentiel, grossir les «sans papiers» d’Afrique du Sud.
Le Zimbabwe détient le record de malades du SIDA : 26% des hommes de 15 à 49 ans, seul le Botswana voisin fait «mieux»… 26,5 %, influencé sans doute par la vulgate dominante et promulguée au rang de politique de prévention par la ministre de la santé d’Afrique du Sud : «pour se prémunir du SIDA ou pour en guérir, il faut manger de l’ail».
L’Afrique du Sud est le premier responsable de ce qui arrive au Zimbabwe (naturellement après Mugabe). Depuis des années ce pays s’est opposé aux sanctions que les pays occidentaux voulaient prendre (ou ont pris) contre Mugabe et sa clique. Mais que peut-on attendre d’un pays qui a suivi, presque, la même voie. Regardez le graphique qui suit :
20 millions d’habitants en 1972, 49 millions en 2008 et un Indicateur du Développement Humain qui plonge sans retour visible à l’horizon. L’année de commencement de la chute ? 1993-4, l’arrivée au pouvoir de l’ANC de Monsieur Mandela. Mais cela est une autre histoire qui mérite que l’on s’y consacre pour la raconter. Histoire très différente de celle que nous chantent les gauches européennes, avec Johnny Clegg, qui y voient l’exemple de la cœxistence des races comme elles voyaient (ou voient encore) le bonheur socialiste ayant pris corps à Cuba.
Comme il est utile de raconter, aussi, l’histoire de la pénétration (ancienne et présente) de l’Islam en Afrique avec son cortège d’intolérance, d’obscurantisme et de négation de l’autre. On voit les résultats tous les jours sauf que ce n’est pas politiquement correct d’en parler.
ooooooooooo
Eradication des noirs chrétiens ou animistes au Soudan, pogroms contre les chrétiens noirs au Niger, guerre de la Somalie musulmane contre l’Ethiopie chrétienne, l’Islam avance à pas de géant sur le continent africain dans l’indifférence des autres continents. Et ce qui se passe dans les pays d’Afrique noire n’y est pas étranger. Ce qui permets au chef du Hamas de pérorer à Damas : « Dans quelques années ... ce monde changera, il se soumettra à la volonté arabo-musulmane, car c’est la volonté d'Allah » René Dumont avait tout prévu pour l’Afrique noire qui était mal partie. Sauf cela.