Hosanna! Un gouvernement d’union nationale a reçu l’investiture du Parlement Palestinien. Toutes les chaînes de radio et télévision ont salué, comme il se doit, l’événement qui fait suite aux accords patronnés (imposés ?) par l’Arabie Saoudite et aux plus de quatre cents morts des factions du Hamas et du Fatah pendant le six derniers mois (dix fois plus que les «militants» tués, les armes à la main, par Tsahal). Naturellement, sans attendre une réaction commune du « Quartet » notre Condorcet national a déjà invité le nouveau ministre des affaires étrangères palestinien (un député élu avec l’aide du Hamas mais déclaré indépendant …) pour des discussions à Paris. Et la France a commencé à essayer de convaincre les pays européens de renoncer aux conditions posées pour reconnaître un gouvernement palestinien (reconnaissance d’Israël, renoncement à la violence et reconnaissance des accords signés par l’OLP avec Israël). Regardons ce qui se passe d’un peu plus près.
1. Le gouvernement d’union nationale comporte 23 membres dont 12 venant du Hamas, 6 du Fatah et cinq « indépendants » nommés par le Hamas et le Fatah. Le Fatah sert, d’évidence, de feuille de vigne. Le Premier Ministre, dirigeant du Hamas, étant début Décembre à Damas et à Téhéran a répété que l’AP dirigée par le Hamas ne reconnaîtrait jamais Israël et continuerait le jihad contre lui, jusqu’à sa disparition. Il s’agit d’un «modéré ». En se félicitant du succès de l’entreprise d’unification nationale, Mahmoud Abbas a déclaré que "toutes les violences doivent s’arrêter" et le Premier Ministre que «la résistance à l’occupation continuera jusqu’à la libération de la Palestine»
2. Pour qu’il n’y ait pas de malentendu, plusieurs dirigeants du Hamas ont donné des précisions avant ou après l’accord initié (imposé) par l’Arabie Saoudite : (i) «La question de la reconnaissance d’Israël n'a pas été adressée du tout dans l’accord de la Mecque. Dans la plateforme du nouveau gouvernement il n'y aura aucun signe de reconnaissance (d'Israel), nonobstant les pressions qu’exerceraient les Etats-Unis et le Quartet – (Reuters, 10 février 2007)» ; (ii) le porte-parole du Hamas Ismail Radwan a souligné que l'accord n'a marqué aucun changement du refus de Hamas de reconnaître Israel «L'accord conclu à la Mecque ne signifie pas la reconnaissance de l'entité israélienne… La position de Hamas est ferme et bien connue quant à la non-reconnaissance de la légitimité de l'entité sioniste…(interview AFP le 9 février 2007). »; (iii) «L’islam interdit de signer un traité de paix avec les Juifs, car « le conflit avec les Juifs est religieux, existentiel et n’a rien à voir avec les frontières.» … la libération de la terre sera accomplie uniquement par la voie du jihad et grâce à la mobilisation de la nation islamique, ce qui représente le chemin le plus court pour restaurer les droits des Palestiniens et faire reculer "l’avarice des Juifs" - déclaration commune, précédents Ministres des Affaires Etrangères et des Affaires Religieuses ; (iv) et pour couronner le tout, le No1 du Hamas (en exil) déclare à Damas : «on reconnaît l’existence d’Israël mais pas son droit d’exister»
3. L’Occident (moins les Etats-Unis ?) n’ayant pas le courage de faire une opération à cœur ouvert tente de faire des pontages … Cela commence avec le toujours ineffable Javier Solana qui déclare, d’une manière docte et sans doute étudiée, « Je ne pense pas que l’objectif du Hamas est la destruction d’Israël. L’objectif du Hamas est la libération des Palestiniens. La libération de leur peuple, pas la destruction d’Israël". Ce qui ne peut pas indiquer autre chose que le souhait, non pas de résoudre le problème (d’ailleurs impossible …) mais d’obtenir par l’apaisement une certaine tranquillité. Cela continue avec l’approbation enthousiaste de l’accord de la Mecque considéré comme une étape importante sur la voie demandée par le Quartet (porte-parole du Ministère des Affaires Etrangères). Par une sorte d’illusion optique ou d’occultation de la vérité on considère que les choses bougent et on essaye d’identifier dans les paroles du Hamas (car on considère que le Fatah accepte Israël) tout ce qui peut donner l’impression que l’on va vers une solution du conflit. Et on souligne, en même temps, le fait qu’Israël ne veut pas reconnaître le nouveau gouvernement.
4. Mais, les hypothèses fausses conduisent à des conclusions erronées. En effet, dans le préambule de la charte du Hamas, on trouve la déclaration suivante : «Israël … existera jusqu'à ce que l'Islam l'élimine comme il avait éliminé ses prédécesseurs» Et l'impossibilité d'accepter l'Etat de l'Israël et et son droit d’exister sont encore soulignés dans l’article 28, qui affirme : «Israël, en vertu de son essence juive et de sa population juive, défie l'Islam et les musulmans». Parallèlement, l'article 19 de la Charte du Fatah (jamais abrogée ni modifiée) proclame : «La lutte armée est une stratégie non pas une tactique et la révolution armée des masses arabes palestiniennes est un facteur décisif dans le combat de libération et d’éradication de l'entité sioniste et cette lutte ne cessera pas avant que l'état sioniste soit détruit et la Palestine complètement libérée» Et pour éviter des malentendus l'article 12 proclame que le but du Fatah est «la libération complète de la Palestine et l'extirpation de l'existence économique, politique, militaire et culturelle sioniste». Comme il est peu probable que la diplomatie occidentale ignore ces éléments, on ne peut qu’inférer qu’elle participe à un jeu de rôles. Sur le dos d’Israël. Car il n’est pas possible qu’elle considère comme vraie l’hypothèse selon laquelle le Hamas (ou même le Fatah) auraient renoncés au souhait de voir disparaître Israël.
5. La même diplomatie occidentale est parfaitement consciente que l’endoctrinement des masses palestiniennes (haine du juif, haine d’Israël, etc.,) pendant des dizaines d’années ne peut pas disparaître. La preuve éclatante est apportée par une enquête d’opinion récemment effectuée par Near East Consulting (NEC- un institut de sondage qui conduit des enquêtes mensuelles au sujet des opinions de la population palestinienne). Les résultats d’une dernière enquête ont montré qu’à la question : «Israël a-t-elle le droit d’exister ?» une majorité accablante (75 pour cent) des sondés ont répondu par un non retentissant. De plus, parmi les jeunes de 18-21 ans, environ 90% déclarent qu’Israël n’a pas le droit d’exister tandis que pour les plus jeunes encore le refus de reconnaître ce droit était pratiquement absolu, atteignant presque 100%. Ce qui permet d'inférer qu’il y a peu d'espoir que les futures générations soient disponibles pour une solution pacifique du conflit. Mais qui éclaire abondamment le refus d’Israël d’accepter le retour de plus de 4 Millions de «réfugiés » en réalité autant de citoyens étrangers descendants des 650.000 palestiniens ayant quitte leurs foyers (ou étant expulsés) au moment du partage par l’ONU de l’ancienne Palestine.
6. Naturellement, le retour des « réfugiés » est considéré comme une clause sine qua non de la dernière initiative de paix (Arabie Saoudite, 27 mars 2002) initiative saluée par tout l’Occident (sauf les Etats-Unis ?). Le jour de la présentation de l’initiative saoudite à Beyrouth, deux autres événements on eu lieu. Le premier, à 150 km, à Natanya où 30 israéliens ont été assassinés par un jihadist pendant qu’ils célébraient la Pâque Juive. Le deuxième avait lieu à Beyrouth même : réunis en conférence, des responsables militaires du Hezbollah, Al-Qaida, Hamas, Fatah, et du Jihad islamique se sont assemblés pour discuter de leur collaboration et de leur stratégie. Les suites on les connaît : victoire du Hamas aux élections, transformation de Gaza en mini Afghanistan (des Talibans), rapt de soldats, guerre au Liban en attendant mieux. Mais l’insistance des pays arabes pour le « retour des réfugiés » en Israël (tout en acceptant, en apparence la solution de «deux états») se fonde sur des faits qui ne peuvent pas échapper à un observateur aussi averti que la diplomatie occidentale. En effet : (a) les Palestiniens, dans leur grande majorité, dans le monde arabe sont traités comme étrangers auxquels on interdit l'accès à l'éducation, à la santé et/ou aux prestations sociales ; (b) en 1995, le gouvernement de Libanais a publié un décret interdisant clairement aux réfugiés de travailler dans 72 professions ; (c) UNRWA estime que 60 % des palestiniens se trouvant au Liban vivent en deçà du seuil de la pauvreté. Imposer à Israël de « reprendre les réfugiés » serait, pour la plupart des pays arabes se retirer une épine du pied tout en fournissant à un jihad interne à Israël de nouvelles munitions …
L'ÉVIDENCE indique que Hamas n'a changé, ni en principe ni dans la pratique, afin de se conformer aux exigences de la communauté internationale présentées par le Quartet. Approuver à la plateforme politique d'un gouvernement palestinien qui est investi selon ces principes semble, à tout le moins, incompatible avec les principes édictés par le Quartet et maintenus en l’état depuis janvier 2006. Et le rejet pur et simple par le Hamas de ces principes a été énoncé clairement par Khalil Abu Leila, membre du bureau politique de Hamas, après que l'accord de la Mecque ait été conclu : «Je crois que Mecque est un succès, parce que le but a été atteint. Mais en ce qui concerne les principes du Hamas, Hamas maintient ses positions dans l'intérêt le plus haut du peuple palestinien. Il continue à ne pas être d'accord à se soumettre ou à obéir aux conditions du Quartet» (BBC – Service en langue arabe, le 16 février 2007). Ce qui va suivre ? On oubliera le tout, pour ne pas «abandonner le peuple palestinien» (Mme Ferrero-Waldner, Commisaire Européen, ancienne accointance de Jörg Haider à l’extrême droite autrichienne) et on continuera à verser 500 Millions d’euros annuellement par les voies les plus obscures. Car le conflit israélo-palestinien est la clé de voûte de la paix dans le monde et l’apaisement n’a pas de prix.