« I walk on thin ice »
(E. Macron à un interlocuteur américain)
Nous vivons une sorte d’intermezzo peuplé par les manifs de samedi après-midi (et leurs casseurs intégrés), par les débats auxquels participe le Président, par l’inexistence des partis politiques (ou de la majorité) à l’Assemblée Nationale et par la logorrhée des chaînes d’information continue qui vous font grossir une grenouille aux dimensions d’un bœuf (La Fontaine m’excusera pour l’emprunt).
En guise de conclusion à ce qui se passe (sans savoir ce qui adviendra) je reprends un passage d’un texte de Erwan Le Noan publié par Le Figaro le 30.12.18 qui me semble un bon résumé : « Le mouvement des «gilets jaunes» n'est ainsi pas révélateur d'une prétendue crise du libéralisme: il est le fruit de l'agonie de l'État-providence, qui se matérialise par la déliquescence des services publics et illustre l'incapacité des élites à proposer des perspectives susceptibles de donner du sens à l'exigence de changement comme de l'accompagner efficacement. »
On peut, donc, le temps de l’intermezzo, laisser un peu de côté ce qui se passe chez nous pour regarder l’autre pôle du blog : Israël et, naturellement, la relation France-Israël.
Que dire d’Israël que l’on n’ait pas déjà dit ? L’économie continue avec son rythme de croissance d’environ 3,5%/l’an depuis des lustres, le PIB/habitant est (à peu de choses près) celui de la France, le salaire minimum (équivalent du SMIC) à dépassé le SMIC comme aussi, le salaire minimum en Allemagne ou celui d’Angleterre, deux fois plus qu’en Grèce ou Portugal, quatre fois plus qu’en Europe de l’Est. Bon élève, le pays a un déficit budgétaire de 2% et un endettement total de 60% du PIB (on dirait qu’il respecte les critères de Maastricht…Ce qui est aussi remarquable c’est l’investissement en start up(s) qui dépasse, annuellement, ce que l’on trouve en Allemagne, France ou Angleterre, en valeur absolue. Ajouter à cela la confiance des grands investisseurs étrangers qui n’ont cure des soi-disant risques liés à la situation géographique du pays. Un cas d’école mérite le rappel, INTEL : la semaine dernière, le Ministère des Finances israélien a annoncé qu'Intel avait décidé d'investir 11,9 milliards de dollars dans l’expansion de ses activités en Israël. 12% de tous les brevets déposés par Intel de 2015 à 2018 sont originaires d'Israël, ce pourcentage étant passé à 13,5% en 2018 ; Intel emploie 15.000 personnes en Israël et exporte annuellement plus de 4 milliards de $ de produits conçus, développés et fabriqués par ses filiales israéliennes. L’investissement total d’Intel en Israël dépasse 35 milliards de $.Tout en sachant que « it’s the economy, stupid » (J. Carville pour Bill Clinton) la liste des prouesses d’Israël est longue dans les domaines aussi différents que la vente d’armes sophistiquées (en 2015 déjà, Israël et les Etats Unis couvraient 71% du marché mondial de drones militaires ! – La Tribune), les usines de désalinisation d’eau de mer, l’irrigation « goutte à goutte », les végétaux/légumes génétiquement modifiés (les tomates cerise et variations similaires « inventées en Israël » par deux professeurs de l’Université Hébraïque de Jérusalem en 1973) ou ses contributions scientifiques (10 Prix Nobel de 1994 à 2013) ou ses autres contributions reconnues au plan mondial. Donc, tout va bien. Oui, mais…
Difficile d’oublier que le voisin du Nord, à l’occasion d’une guerre tribale ayant fait plus de 500.000 morts, a laissé l’Iran essayer de s’implanter militairement sur sa frontière avec Israël cela avec la complicité de la superpuissance russe qui contrôle tout ce qui se passe en Syrie. Cependant, disposant de techniques inconnues aux uns et aux autres l’aviation israélienne se balade comme elle veut dans le ciel syrien (ou plus loin, on dirait que tous ses avions sont furtifs…) et détruit tout ce que les iraniens, soi-disant abrités par la couverture anti-missiles des russes (réputée la meilleure du monde), décident d'installer. Un mot seulement : si une fusée est tirée par un équipement d’origine russe contre un avion israélien, on détecte sa trajectoire et on détermine l’endroit précis d’où la fusée est partie. Aussitôt (le tout se passe en moins d’une seconde) une fusée israélienne détruit l’équipement d’origine russe tout en renvoyant un clip vidéo pour prouver la destruction. Dernière date de l’utilisation du système le 21 janvier 2019 :
Deux résultats : les russes évitent d’activer les équipements anti-missiles car ils risquent d’être détruits et la suprématie aérienne d’Israël en Syrie est totale. Comme est (probablement) totale la collecte de toutes les informations militaires syriennes.
Dans son côté Sud Israël subit l’agitation permanente de deux autres supplétifs de l’Iran, le Hamas et le Jihad Islamique. Qui, entre autres, avaient « inventé » une nouvelle forme de guerre, guerre souterraine : construction de tunnels partant de Gaza (de sous les maisons…) pour arriver en Israël. Des tunnels longs de plus de 2.000 mètres, équipés avec électricité, construits à plus de 30 m. de profondeur (certains à plus de 50 m !). Israël a réussi (après des recherches de plus de trois ans) à concevoir un équipement qui a permis la détection de tous les tunnels creusés par le Hamas et ensuite leur destruction. Des dizaines de millions de $, aide internationale fournie par les bienfaiteurs des palestiniens sont partis en fumée au lieu d’être utilisés pour assurer un niveau de vie acceptable aux habitants de Gaza. La France a consenti de 2008 à 2017 plus de 500 millions d’euros d’aide aux palestiniens (France Diplomatie). Ne le dites pas aux Gilets Jaunes qui réclament le retour de l’ISF. Quant à l’Europe… elle contribue au bonheur de l’Autorité Palestinienne avec env. 450 millions d’euros annuels !
Mais les spécialistes du Hamas en construction de tunnels ont fait école : ils ont appris aux terroristes du Hezbollah (Liban) à faire de même sur une partie de la frontière d’Israël. Sauf qu’il s’est agi non pas de terrains terre/sable mais de terre/granit ! Qu’à cela ne tienne… Israël a réussi à détecter les tunnels récemment (certains forés à 60 m. sous terre !) et de les détruire. Et en demandant pourquoi l’ONU ne proteste pas ? pourquoi les 16.000 membres des troupes de l’ONU stationnés du côté du Liban à la frontière avec Israël n’ont rien vu ni rien entendu ? 40 diplomates de l’ONU ont été conviés par Israël pour voir ce dont il s’agissait :
Bon, on sait tout cela. Que l’Iran veuille détruire Israël n’est pas un scoop. Que tous les chefs militaires iraniens l’annoncent, urbi et orbi, n’est pas un scoop non plus. Le dernier en date (DEBKA, 03.02.19) : « Un jour après avoir testé un missile de croisière volant à basse altitude capable d'atteindre Israël, l'Iran a intensifié ses menaces dimanche. Le Général de Brigade Hossein Salami, Adjoint du commandant des gardiens de la révolution, a déclaré lors d'une réunion à Mashhad que la « capacité stratégique » de Téhéran était bien conçue « pour la destruction de l’entité illégitime d’Israël ». Il a déclaré: «Nous les avertissons que si une nouvelle guerre éclatait, elle aboutira à leur disparition », ajoutant que le déclenchement des combats sur le terrain entraînerait la défaite d'Israël « dans un délai de trois jours ». Que ce clown ose menacer de disparition un pays crédité de disposer de 150 ogives nucléaires –partie classiques, partie à hydrogène et partie à « neutrons » et de trois capacités pour les transporter (fusées balistiques, avions et sous-marins) voilà qui est et téméraire et imprudent. Mais qu’aucun pays majeur, les médias, ou l’ONU ne soit scandalisé par ce genre de déclarations irresponsables cela laisse rêveur. Car, enfin, un pays membre de l’ONU menace de détruire un autre pays membre. La Charte de l’ONU ne l’accepte pas, je crois…
Même pas la France ? Eh oui, la France elle a d’autres soucis. Qui n’empêchent pas son Président d’être allé le week-end dernier faire du tourisme en Egypte et d'aller au cours du mois de février au Liban et en Irak, le tout après avoir annulé un voyage prévu de longue date pour novembre dernier en Israël. De plus, toujours dans le cadre de la relation amicale franco-israélienne la France s’est trouvé encore deux sujets de dispute avec Israël : le fait qu’au bout de 20 ans de présence d’une force internationale (dont le penchant pour la « défense » des palestiniens et le parti-pris contre les israéliens est devenu trop évident) Israël a décidé de ne plus renouveler le mandat de ladite force (dont 3 des 5 membres n'ont jamais été disposés à être gentils avec Israël : Italie, Norvège, Suède, Suisse, Turquie). Ce qui a engendré une déclaration forte du Quai d’Orsay « La France met en garde contre l'expulsion du groupe de surveillance d'Hébron qui pourrait exacerber les tensions et appelle Israël à reconsidérer sa décision » De quoi je me mêle ?
Mais il y a mieux. Le Tombeau des Rois d’Israël à Jérusalem, cela vous dit quelque chose ? Ce petit territoire[1] a été administré par la France pendant les derniers 150 ans. Elle a décidé de demander à Israël de reconnaître sa souveraineté sur ce territoire et de s’engager, par écrit, contre toute réclamation ultérieure.
Avouez que cela vaut son pesant de cacahouètes ! La France ne reconnaît pas la souveraineté d’Israël à Jérusalem (même pas sur Jérusalem Ouest) mais lui demande de reconnaître la sienne, pays qui se trouve à 3.500 km de là sur un bout de sa capitale. Une nouvelle forme de néocolonialisme ? Ou simplement une nouvelle poussée d’antisionisme (pour ne pas dire antisémitisme) du Quai d’Orsay ? Non, c’est une affaire d’Etat : Des sources ont informé Israël Hayom que, lorsque le président Reuven Rivlin s'était rendu en France le mois dernier, il avait été surpris lorsque son homologue français, Emmanuel Macron, avait présenté les demandes de son pays concernant le site. (Israel Hayom, 05.02.19).
On va revenir en France car, vraiment, on file du mauvais coton chez nous ...
[1] A coté de Sheikh Jarrah, datant du Deuxième Temple, lieu où on a trouvé le sarcophage de Reine Helena d’Adiabene qui a été exposé au Louvre …